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Risques psychosociaux : ce qui fait flancher les salariés

Une récente étude européenne de la Dares montre combien les facteurs de risques psychosociaux varient d'un pays à l'autre. Côté français, le malaise des salariés trouve surtout sa source dans le manque d'autonomie, de temps et de soutien social au travail. Le défaut de perspectives à long terme est aussi un élément déclencheur.

Risques psychosociaux : ce qui fait flancher les salariés

L’expression « risques psychosociaux » recouvre-t-elle les mêmes réalités pour un salarié slovène que pour un salarié français ou danois ? L’étude publiée sur le sujet en décembre par la Dares (direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques) démontre en tout cas que les facteurs déclencheurs et les niveaux d’exposition diffèrent d’un pays à l’autre. En France, ce sont surtout la « pression temporelle », le manque d’autonomie et de soutien social, ainsi que la non-durabilité de l’emploi qui sont en cause.

Un travail aussi intense qu’ailleurs

C’est un fait établi, la réduction du temps de travail a pesé sur l’intensification du travail des Français, même si pour certains, elle a aussi contribué à améliorer leur qualité de vie. L’EECT 2010 (enquête européenne des conditions de travail) sur laquelle s’est basée la Dares montre de son côté que le salarié français se situe dans la moyenne européenne quand il s’agit d’intensité du travail. Il aurait en effet moins de normes de qualité précises à respecter, moins d’auto-évaluation à mener quant à la qualité de son travail, mais plus d’objectifs de production et de performance à atteindre (1,5 fois plus que la moyenne européenne). Il est en revanche plus dépendant des exigences des clients ou de ses supérieurs hiérarchiques, et soumis à davantage de contraintes simultanées. Le tout dans le cadre d’un emploi du temps certes moins lourd mais plus morcelé, plus instable qu’ailleurs en Europe.

Pression et manque de temps

Conséquence de ce qui précède : les travailleurs français déclarent plus fréquemment que la moyenne ressentir une « forte pression temporelle ». 11% d’entre eux (contre 9% en moyenne en Europe) affirment manquer de temps pour mener toutes leurs tâches à bien – et en toute logique, le même déséquilibre entre Hexagone et continent se retrouve lorsqu’il s’agit d’avoir le sentiment du travail bien fait –. Pourtant, contrairement aux salariés danois par exemple, les Français ne mordent pas ou presque pas sur leur temps de travail pour régler un problème personnel : 45% d’entre eux assurent qu’il ne le peuvent pas. Ils signalent d’ailleurs aux enquêteurs de la Dares plus souvent que les autres salariés leur difficulté à concilier vie professionnelle et vie privée, ou plutôt, vie sociale.

Manque d’autonomie à plusieurs égards

À la question « En général, votre responsable/superviseur immédiat vous encourage-t-il à participer aux décisions importantes? », 42% des Français répondent par la négative, alors que la moyenne européenne est de 35%. Qu’il s’agisse de décisions relatives à sa cadence ou à ses méthodes de travail, la voix du salarié de l’Hexagone pèse moins lourd que celle de ses homologues européens. S’il peut néanmoins décider de l’heure de sa pause ou de l’ordre d’exécution de ses tâches, il reste bien loin des pays scandinaves, champions de l’autonomie d’après l’étude. À cette carence s’ajoute un manque de soutien social sur le lieu de travail, notamment de la part des collègues. C’est en tout cas ce que signalent 11% des travailleurs français interrogés, alors que le taux est de 4% chez nos voisins britanniques.

Championne d’Europe du harcèlement moral

Cet isolement est-il propice au harcèlement moral ? Toujours est-il que d’après la Dares, la France est le pays le plus exposé au phénomène. 9% des salariés français déclarent en avoir été victimes au cours des douze derniers mois, bien au-delà de la moyenne européenne qui est de 4%. La France est également en tête en matière de discriminations liées à l’origine ethnique ou à la couleur de peau, et à la religion, mais cette fois derrière le Luxembourg et la Belgique. Les chiffres français atteignent néanmoins plus du double de la moyenne européenne.

Court et long terme

Malgré cela, huit salariés français sur dix reconnaissent se sentir bien là où ils travaillent. D’autant plus que les entreprises de l’Hexagone ont été moins concernées que la moyenne par les restructurations (35% contre 40% dans l’Union européenne), et que le sentiment de précarité y est plus faible qu’ailleurs. 12% seulement des Français craignent de perdre leur emploi à court terme, contre 16% en moyenne sur le continent. Ce qui les angoisse bien plus, pointe l’étude de la Dares, c’est le long terme. Défaut de formation professionnelle continue ? Conscience d’un travail usant difficile à exercer dans les mêmes conditions jusqu’à l’âge de la retraite ? Plus de la moitié des personnes interrogées estiment en tout cas qu’à 60 ans, ils ne seront plus capables de faire le même travail. Se basant sur ce « fort sentiment de non-soutenabilité », les chercheurs ont estimé contre toute attente l’insécurité économique des salariés français plus préoccupante que la moyenne.

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