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L'absence d'entretien annuel fait grimper le risque psychosocial

Plus d'un salarié sur dix doit atteindre des objectifs précis, chiffrés, dont il ne peut pas discuter avec son supérieur hiérarchique en entretien individuel. L'absence de rendez-vous annuel et plus globalement, d'une évaluation cadrée pour ces travailleurs les expose plus que les autres aux risques psychosociaux, selon une récente étude de la Dares.

L'absence d'entretien annuel fait grimper le risque psychosocial

Alors que la période des entretiens annuels s’achève, la Dares (direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques) publie une étude basée sur l’enquête Sumer 2010 au sujet du lien entre risques psychosociaux et facteurs organisationnels. Et d’après les chercheurs, l’absence d’entretien individuel – notamment dans le cas de salariés à qui on a fixé des objectifs chiffrés précis à atteindre – accentue les risques.

Un salarié sur deux concerné par l’entretien individuel

Si les entretiens individuels concernent un peu plus de la moitié de la population active en France (56%), l’évaluation qu’ils permettent de mener ne se fait pas toujours sur « des critères jugés précis et mesurables ». Ils concernent à la fois des professions dont les objectifs sont chiffrés et déterminés (les cadres et professions intermédiaires ainsi que les salariés des grandes entreprises et établissements de plus de 500 personnes notamment) et des professions comme par exemple secrétaire de direction, ingénieur de l’informatique, technicien etc., qui doivent répondre à des objectifs de productivité. La Dares distingue aussi un autre profil : celui des salariés qui travaillent avec des objectifs bien définis, sans pouvoir en discuter ou les négocier.

Objectifs chiffrés et travail intense

Ils représenteraient 13% du total des salariés de l’Hexagone, et seraient majoritairement des ouvriers non-qualifiés dont le rythme de travail est « fixé par le déplacement automatique d’une pièce ou la cadence d’une machine ». C’est surtout sur le cas de ces travailleurs que s’appesantit l’étude de la Dares : globalement, disent les chercheurs, leur activité est plus intense que celle des salariés ayant un entretien individuel annuel cadré. Ils sont plus nombreux que les autres à déclarer devoir se dépêcher pour faire leur travail (50% contre 46%), en raison d’une quantité de travail excessive (44% contre 26% chez les autres salariés).

Exposition au « job strain »

Par ailleurs, ils estiment avoir moins de marge de manœuvre et moins de possibilités de développer leurs compétences professionnelles que les travailleurs qui peuvent en discuter, eux, lors d’un entretien individuel cadré (30% contre 25%). Les salariés contraints d’atteindre des objectifs chiffrés précis sans bénéficier d’un entretien annuel sont donc plus exposés au « job strain » (combinaison forte intensité de travail + faible autonomie décisionnelle).

Un risque de symptôme anxieux plus fort

L’absence d’entretien individuel d’évaluation renforce également l’exposition de ces salariés à des risques psychosociaux liés au sentiment d’absence de soutien social par exemple. Si 14% des salariés estiment en manquer, le taux grimpe à 17% lorsqu’il s’agit de salariés qui ne bénéficient pas d’entretien alors que leurs objectifs sont figés. Ils sont encore plus exposés au sentiment d’activité empêchée, c’est à dire à l’impression de ne pas pouvoir faire un travail de qualité.

Des conséquences sur le mental

L’étude poursuit en établissant une « corrélation négative » entre objectifs chiffrés et santé mentale. D’après les chercheurs de la Dares, le salarié qui doit répondre à des objectifs de productivité impératifs sans avoir d’entretien annuel d’évaluation présente un risque de symptôme anxieux ou dépressif plus fort qu’un salarié qui s’entretient avec sa hiérarchie une fois par an de façon « cadrée », qu’il ait lui aussi des objectifs chiffrés ou non (25% contre environ 20%).

L’entretien individuel bénéfique ?

Il ressort finalement de cette enquête que l’entretien individuel, quand il permet d’effectuer une évaluation bien conduite, basée sur des critères précis, « améliore le vécu du travail » et permettrait souvent d’amoindrir l’exposition aux risques psychosociaux. Les travailleurs qui en bénéficient, qu’ils travaillent en vue d’objectifs chiffrés ou non, ressentent moins le sentiment d’hostilité au travail. Ils ont également moins l’impression d’être traités injustement au travail (12% contre 18% pour les salariés sans entretien individuel), et souffrent moins d’un manque de reconnaissance (21% contre 32%).

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