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La discrimination homophobe en entreprise lourdement sanctionnée par la Cour de cassation

La discrimination dont sont victimes les salariés homosexuels vient enfin d'être reconnue et sanctionnée par la Cour de cassation. Une décision hautement symbolique...

La discrimination homophobe en entreprise lourdement sanctionnée par la Cour de cassation

Au lendemain de l’adoption du mariage pour tous, voilà un arrêt de la Cour de cassation qui ne devrait pas passer inaperçu. Dans une décision du 24 avril 2013, la Cour Suprême condamne une entreprise pour avoir refusé un poste de sous-directeur à un cadre homosexuel. Une discrimination liée à l’orientation sexuelle lourdement sanctionnée par les hauts magistrats.

Les prud’hommes saisis pour discrimination homophobe

Les faits sont les suivants : un cadre d’une grande banque française est licencié pour faute grave alors qu’il compte 29 ans d’ancienneté. Quelques semaines après son licenciement, il signe avec la banque une transaction représentant 23 mois de salaire, soit plus de 250 000 euros. L’article 3 de la transaction prévoyait que le salarié acceptait les conditions et modalités de la rupture de son contrat de travail et se déclarait « rempli de tous les droits qu’il pouvait tenir tant de son contrat de travail que du droit commun ou de la convention collective et réparé de son entier préjudice ». L’article 6 ajoutait que « les parties soussignées renoncent irrévocablement à tous autres droits, instances, actions ou indemnités de quelque nature que ce soit » et que « la présente transaction règle définitivement le litige intervenu entre les parties ». Traduction : le salarié en signant la transaction renonçait à toute action en justice. Pourtant, le cadre avait saisi le conseil de prud’hommes auquel il réclamait des dommages et intérêts pour discrimination homophobe. Des dommages et intérêts qui devaient s’ajouter et non pas se substituer à l’indemnisation qu’il avait déjà perçue au titre de la transaction. Pour le salarié, en effet, la transaction avait eu pour objet de réparer les conséquences de son licenciement mais n’avait pas abordé la discrimination homophobe dont il avait été victime et qui avait entravé son déroulement de carrière.

La transaction n’empêche pas les poursuites pour discrimination

Une telle transaction empêchait-t-elle le salarié d’intenter une action contre son employeur au titre de la discrimination ?

Non, juge la Cour de cassation car « en dépit de l’insertion d’une formule très générale, la transaction ne faisait état que d’un litige portant sur la rupture du contrat de travail », de sorte que « la discrimination alléguée par le salarié n’était pas incluse dans cette transaction ».

Concernant la discrimination liée à l’orientation sexuelle du salarié, la Cour de cassation confirme la décision de la cour d’appel de Paris qui condamne la banque à verser à son ancien cadre la somme de 580 000 euros au titre du préjudice financier découlant de l’entrave au déroulement de sa carrière et de la perte des droits à la retraite consécutifs à la discrimination subi en raison de son homosexualité ainsi qu’à la somme de 35 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi. La Cour de cassation constate que postérieurement à son inscription sur la liste d’aptitude de sous-directeur, le salarié avait postulé en vain à quatorze reprises à un poste de sous-directeur ou à un poste de niveau équivalent. Il avait répondu à des propositions de postes à l’international, à une proposition de poste dans une filiale à Paris et il était le seul de sa promotion à ne pas avoir eu de poste alors qu’il était parmi les candidats les plus diplômés. En outre, plusieurs témoins avaient fait état d’une ambiance homophobe dans les années 70 à 90 au sein de l’entreprise. Autant d’éléments qui laissaient présumer l’existence d’une discrimination en raison de son orientation sexuelle. Quant à la banque, constate la Cour de cassation, les justifications qu’elle avançait ne permettaient pas d’écarter l’existence d’une discrimination en raison de l’orientation sexuelle du salarié.

 Cass. soc. 24 avril 2013, n° 11-15204

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