Interview

Frédéric Salles, "Nous travaillons dans l'ombre, mais tout le monde utilise nos services au quotidien"

Frédéric Salles, président co-fondateur de la start-up montpelliéraine Matooma, nous raconte le parcours étonnant de son entreprise, qui est devenue e deux ans un des acteurs majeurs du marché "Machine to machine". En réalité, Matooma implante des cartes sim dans des machines telles que des téléalarmes pour les personnes âgées, des horodateurs, des alarmes ou encore des compteurs électriques. Avec pour objectif de garantir la transmission des données.

Frédéric Salles,

Comment vous êtes-vous positionné sur un secteur aussi pointu ?

Je suis ingénieur en informatique de formation et j’ai travaillé pendant dix ans sur les cartes SIM embarquées dans des boîtiers électroniques chez SFR. Puis, j’ai travaillé dans le même secteur d’activité dans une entreprise à Montpellier, qui a fait l’objet d’un plan de licenciement économique. On m’a demandé de licencier 5 personnes puis je me suis fait licencier à mon tour !

Je me suis rendu compte qu’il y avait une place à prendre dans le domaine de la transmission de données de machine à machine, et j’ai créé Matooma avec mon associé, John William Aldon, qui est l’un des commerciaux que j’avais dû licencier dans ma précédente entreprise.

L’idée que nous avions était de proposer aux fabricants de boîtiers connectés, notamment dans le secteur de la santé, une garantie de transmission des données. Par exemple : lorsqu’une personne âgée est équipée d’une téléalarme en cas de chute, peut-on se permettre de ne pas avoir de réseau et de ne pas transmettre l’information que cette personne est en difficultés ? Non bien sûr ! Nous avons donc conçu un logiciel de gestion à distance ainsi qu’une carte sim multiréseaux qui, au moment de l’envoi de données va détecter le meilleur réseau aux alentours pour garantir la transmission de cette information. En réalité nous travaillons dans l’ombre, mais tout le monde utilise nos services quotidiennement sans même s’en rendre compte.

Vous travaillez aujourd’hui avec de nombreux partenaires. Comment avez-vous fait pour vous faire connaître en si peu de temps?

Nous avons d’abord ciblé le secteur de la santé. Aujourd’hui, il y a cinq fabricants de boîtiers électroniques (Intervox, Solem, Doro, Assystel et Biotel). Nous sommes donc allés les voir et nous leur avons proposé d’intégrer une carte sim Matooma dans chacun de leur boîtier, pour garantir à leurs clients que leurs données soient transmises quoi qu’il arrive. Nous avons convaincu les fabricants puisque nous avions une offre adaptée pour perfectionner les services qu’ils proposaient.

Nous avons procédé de la même manière pour le secteur de l’énergie, de l’industrie, de la sécurité et des transports… nous venons d’ailleurs de signer un contrat avec Vinci pour intervenir sur leurs horodateurs. Nous couvrons notamment 90 % du secteur du maintien à domicile.

Vous avez été lauréat du Réseau entreprendre en 2012. Est-ce que cela a été décisif dans votre parcours ?

C’est peu de le dire ! Nous n’en serions certainement pas là si nous n’avions pas remporté ce prix. Il faut remettre les choses dans le contexte : mon associé et moi-même étions chômeurs à l’époque. On s’était fait jeter de toutes les banques. Et nous avions besoin de 100 000 euros pour démarrer notre activité ! Nous avons ensuite entendu parler par un ami du Réseau entreprendre. Chez eux nous avons été jugés sur notre capacité à gérer et non sur le projet en lui-même, auquel le jury nous a avoué ne rien comprendre ! Et nous avons gagné un prêt de 25 000 euros à taux zéro. Nous avons eu la chance qu’un des membres du jury soit un banquier de la Société Générale, qui nous a accordé notre prêt de 75 000 euros.

Quels sont vos projets aujourd’hui ?

Notre secteur d’activité est très large et cela nous permet d’avoir de nombreuses perspectives dans d’autres secteurs : par exemple, nous espérons nous implanter dans tout ce qui concerne les compteurs d’eau et les compteurs électriques de façon à effectuer un relevé à distance. Les bornes de recharge de véhicules électriques sont également intéressantes pour nous puisque les personnes abonnées auront des badges qui leur permettront d’être débités automatiquement en fonction de leur consommation.

Par ailleurs, nous ouvrons une succursale à Paris, dans une toute nouvelle pépinière qui est inaugurée cette semaine, le « village de l’innovation », qui appartient au Crédit agricole. Nous sommes toujours en phase de recrutement à Montpellier, dans nos locaux de chez Cap Oméga, une autre pépinière d’entreprises, qui vient tout juste d’être classée 4e meilleur incubateur mondial par le top 10 de l’UBI Index. Pour 2015, nous ouvrirons une agence en Italie puis dans deux autres pays européens, que nous ne connaissons pas encore. Aujourd’hui, nous touchons des clients européens depuis la France; demain, nous voulons nous y installer pour les atteindre plus facilement.

Propos recueillis par Sophie Roy

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