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Click and collect : les commerces de proximité contraints de s’adapter pour survivre
Depuis le 30 octobre, les commerces jugés « non essentiels » ont été forcés de tirer leurs rideaux. Le gouvernement enjoint ces commerces de proximité à mettre en place des solutions alternatives telles que le click and collect ou la prise de RDV. Des mesures critiquées par fédérations et syndicats.
[Mise à jour le 13 novembre à 14h30] Le Premier ministre a déclaré le 13 novembre en conférence de presse, à l’issue du premier point d’étape du second confinement, que « des premiers allègements pourraient intervenir à compter du 1er décembre pour les commerces sur la base d’un protocole renforcé », si la tendance à la baisse de l’épidémie se confirme la semaine prochaine. Les bars et restaurants ne seraient pas concernés.
« Arrêtons d’infantiliser et de massacrer les commerçants. Le commerce ne doit pas être la variable d’ajustement de la crise, clame Eric Plat, président de la FCA, Fédération du commerce coopératif et associé. Comme l’a indiqué le chef de l’État, nous devons apprendre à vivre avec le virus. Et devons de la même manière apprendre à commercer avec le virus. Tant qu’il n’y aura pas de vaccin, il risque d’y avoir une 3ème, une 4ème ou une 5ème vague. On ne va pas fermer les établissements à chaque fois. »
D’autant plus que le commerce de proximité a appliqué un protocole sanitaire strict suite au premier confinement qui a permis d’assurer la sécurité des salariés comme des clients et d’éviter que les commerces ne deviennent des lieux de contamination. « À ma connaissance, il n’y a pas eu de clusters dans les commerces ; sinon ces derniers auraient fait la une des actualités », renchérit Eric Plat qui milite, comme nombre de ses confrères, pour une réouverture « responsable » des commerces le 13 novembre prochain.
« Les stop and go, en fermant, rouvrant, refermant les magasins… non seulement ne résolvent rien mais ajoutent une crise à la crise, mettant en péril les deux millions d’emplois du commerce de détail », explose à son tour Philippe Gueydon, co-président de la Fédération des commerces spécialistes des jouets et des produits de l’enfant. Pour apaiser la colère des commerçants, le gouvernement a fermé les rayons jugés « non-essentiels » des grandes surfaces. Reste encore à régler la question de la concurrence des pure players exacerbée avec la perspective du Black Friday.
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Click and collect et prise de RDV
L’impératif « ne pas consacrer le monopole entre les mains de quelques grands acteurs » est d’autant plus important à cette période de l’année qui concentre la plus grande part de chiffre d’affaires pour nombre de secteurs. Les fêtes de fin d’année représentent ainsi 20 à 60 % de l’activité pour certains d’entre eux, comme les jouets ou l’habillement. « La situation est catastrophique, confirme Bernadette Fulton, secrétaire générale de la FNH, Fédération nationale de l’habillement : la plupart des PGE ont déjà été consommés. Plus d’un tiers des entreprises de notre branche vont être en cessation de paiement ».
Pour assurer un minimum de chiffre d’affaires, les commerces de proximité peuvent recourir à des solutions alternatives de vente comme le click and collect, la prise de RDV, la livraison à domicile ou encore les ventes via Internet. Des solutions que déplore Eric Plat : « Avec cette option de rendez-vous, on casse toutes les règles du commerce traditionnel en supprimant la possibilité d’achats coup de cœur. » En outre, ces solutions ne remplaceront pas le commerce physique traditionnel. « Pour les enseignes qui ont un site internet, celui-ci représente entre 10 et 20 % de leur chiffre d’affaires. Même si cette part va augmenter, cela ne permettra pas de compenser la perte de chiffre d’affaires de ce qui aurait été enregistré en magasin », déplore Yohann Petiot, directeur général de l’alliance du commerce.
« Le temps de se mettre en action, nous arriverons à la période des soldes. Il aurait fallu imaginer ces solutions dès le premier confinement. »
Enfin, si certains points de vente sont capables de déployer de tels dispositifs, ce n’est pas le cas pour tous. Les petits commerces étant nombreux à ne pas être digitalisés –seul un magasin sur trois disposerait d’un site Internet – et à « fonctionner encore avec des tableurs excel pour constituer leur base clients », note Bernadette Fulton. Or, la digitalisation d’un commerce nécessite un dispositif complet et complexe et tout un arsenal d’outils, avec notamment des logiciels de caisse qui intègrent la base client, les stocks et leurs évolutions en temps réel.
Cette démarche de digitalisation arriverait finalement trop tard : fédérations et syndicats estimant qu’il sera difficile de l’appliquer dans l’urgence avant Noël. « Cela ne sera pas une solution miracle. Il est compliqué pour elles de monter en puissance sur le digital en quelques jours et en situation de crise et de se rendre visibles. Cela nécessite de l’argent et des compétences », explique Yohann Petiot. « Le temps de se mettre en action, nous arriverons à la période des soldes. Il aurait fallu imaginer ces solutions dès le premier confinement », constate de son côté avec amertume Marc Pradal, président de l’UFIMH, Union française des industries mode & habillement.
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100 M€ pour se digitaliser
Pour pallier la complexité de cette mise en application, le gouvernement a lancé un appel d’offres pour identifier les acteurs numériques qui seraient les plus à mêmes d’aider les TPE/PME à se mettre à la vente en ligne. Et pour accompagner financièrement les chefs d’entreprises, le ministre de l’Économie Bruno Lemaire a annoncé la mise en place d’un fonds de 100 M€ (cf. encadré).
Poursuivant l’objectif d’avoir « moins de la moitié des petits commerçants qui ne soient pas digitalisés ». Interrogée sur cette enveloppe allouée par l’État, Bernadette Fulton fulmine, arguant qu’il faut compter en moyenne 5 000 € pour se doter d’une solution informatique complète : « C’est un montant totalement arbitraire qui ne représente pas grand-chose. Ce n’est pas avec ces 100 000 M€ que l’on va digitaliser les quelque 900 000 commerces existants. Nous avions par exemple estimé qu’il fallait 150 M€ pour digitaliser 80 % des 34 000 entreprises de notre branche. »
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Quant aux aides allouées pour pallier le manque de chiffre d’affaires des commerces, comme l’indemnisation jusqu’à 10 000 € par mois au titre du fonds de solidarité, syndicats et fédérations les jugent encore une fois insuffisantes : « Cela ne remplace pas le chiffre d’affaires. Nos boutiques vivent ou survivent encore avec le PGE mais pour combien de temps ? Et le montant de ces indemnisations ne correspondra jamais à la perte de la valeur ajoutée de garder nos boutiques ouvertes. On ne veut de toute façon pas vivre de subventions », conclut Marc Pradal.
Un guide pratique pour les TPE, commerçants et artisansLe gouvernement a publié hier un guide pratique qui recense les conseils et les bonnes pratiques numériques. Une fiche conseil courte et didactique qui résume en 3 axes les premières actions à mettre en place :
Le gouvernement a également mis en ligne :
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Charlotte De Saintignon
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