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Défaillances d’entreprises : la CPME reste sur ses gardes

Le président de la CPME s’attend à un rattrapage logique des défaillances d’entreprises à l’avenir. S’il n’y a pas de quoi s’alarmer à ce jour, l’inconnu du « quand » et du « comment » reste préoccupant. Un indicateur : l’activité.

Défaillances d’entreprises : la CPME reste sur ses gardes
« La crise n’est pas soldée », a rappelé François Asselin lors d'une rencontre organisée par l'AJPME le 14 juin, alors que le niveau des défaillances d'entreprises reste anormalement bas. © Thomas SAMSON / AFP

« On empile les crises et pour autant, les TPE/PME tiennent plutôt le coup », se réjouit François Asselin, président de la CPME, lors d’une rencontre organisée par l’association des journalistes PME (AJPME) le 14 juin. Les prévisions économiques s’annoncent globalement bonnes pour le secteur HCR. Idem pour la construction et le service où l’activité reste soutenue, indique-t-il. Et les défaillances d’entreprises – freinées un temps par les aides d’état – ne décollent (toujours) pas. « On est dans une situation complètement paradoxale, relève-t-il. Il faut s’attendre à une montée de la sinistralité. Ce que l’on ne mesure pas, c’est quand ». Et comment.

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Tout va très bien madame la marquise …

Selon une étude de l’Union des entreprises de proximité (U2P) publiée le 7 juin, les artisans, commerçants et professionnels libéraux ont connu une « croissance robuste » de leur chiffre d’affaires au 1er trimestre 2022 (+ 8,5 %). Si la situation est plus contrastée selon les secteurs, la tendance est là : « Ils renouent progressivement avec leur niveau d’activité pré-covid », confirme Dominique Métayer, président de l’U2P. Le chiffre d’affaires des TPE/PME a également augmenté de 12,5 % au 1er trimestre 2022 par rapport au 1er trimestre 2021 (+ 10,8 % par rapport au 1er trimestre 2019), selon la dernière analyse trimestrielle du Conseil national de l’ordre des experts-comptables.

« Nous ne décelons pas de difficultés particulières pour les entreprises aujourd’hui. Les entreprises fragilisées l’étaient déjà avant la crise. Du point de vue des banques, il n’y pas de signes d’un mur des faillites. »

Une dynamique qui ne semble pas freinée par les premiers remboursements des prêts garantis par l’État (PGE). « À la banque populaire, nous avons très peu d’impayés y compris sur les PGE qui rentrent en amortissement (moins d’1 % d’impayés) », témoigne Virginie Normand, directrice des marchés spécialisés au groupe BPCE. « Les débuts des remboursements se sont passés correctement, complète le médiateur du crédit à la Banque de France, Frédéric Visnovsky. Nous avons très peu de demandes de traitement de sortie de crise (seulement 200 demandes fin avril) et comptons peu de procédures devant les tribunaux. »

Résultat : le rattrapage des défaillances d’entreprises n’est toujours pas d’actualité. « Le nombre de défaillances d’entreprises reste à un niveau faible, proche de 32 000 sur les 12 derniers mois », rend compte la Banque de France dans une statistique du 20 juin 2022. « Nous ne décelons pas de difficultés particulières pour les entreprises aujourd’hui. Les entreprises fragilisées l’étaient déjà avant la crise. Du point de vue des banques, il n’y pas de signes d’un mur des faillites », résume ainsi Virginie Normand.

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… mais jusqu’à quand ?

Ce qui ne veut pas dire qu’il ne s’érigera pas. « Ce qu’on ne mesure pas, c’est la hauteur de la vague [de défaillances]. Et à quel moment arrivera-t-elle, explique la bancaire. Ferons-nous face à un tsunami radical ou à une longue vague étalée dans le temps ? » La deuxième option est envisageable. « Sur 10 mois glissants, si on se stabilise à 50 000 voire 60 000 défaillances d’entreprises, chapeau ! On aura sacrément amortie ces crises consécutives », espère François Asselin, qui n’exclut pas non plus, que la situation bascule.

« Tout repose sur la poursuite ou non de l’activité. Tant qu’il y en aura, il y aura des solutions. »

« Tout repose sur la poursuite ou non de l’activité, explique-t-il. Tant qu’il y en aura, il y aura des solutions. Si elle commence à fléchir, nous serons dans une situation compliquée et la panique remonterait vite. Nous avons beaucoup d’anxiété chez nos adhérents, et pas seulement du côté de nos TPE. » En cause ? Les coûts de production, les pénuries d’approvisionnements, de main-d’œuvre et la hausse des salaires. « Les entreprises se retrouvent prises en étau entre des perspectives d’activité qui vacillent et des coûts qui s’alourdissent dangereusement », note ainsi Xerfi dans sa dernière conjecture pour les entreprises de juin 2022.

Selon l’institut, les dirigeants résistent aujourd’hui en maintenant l’investissement et l’emploi pour maintenir les volumes d’activités, en remontant les prix pour absorber les coûts et en bénéficiant indirectement des dispositifs de soutien de l’État aux ménages qui minorent les pressions salariales et les charges induites par une hausse des salaires. Si la dégradation de la demande n’est pas encore totalement perceptible, cela ne saurait tarder. « Il n’est donc pas certain que les anticipations sur lesquelles s’arrime encore le volontarisme des entreprises résistent très longtemps à un freinage des débouchés qui se diffuse lentement mais sûrement », estime Xerfi. Il convient ainsi d’être prudent : « La crise n’est pas soldée », rappelle François Asselin.

76 % des PGE dormiraient sur les comptes

Les entreprises seraient toutefois bien armées pour se relancer, investir ou stocker. « 76 % des PGE délivrés par la Banque populaire sont encore disponibles en trésorerie sur le compte de nos clients » a révélé, Virginie Normand, directrice des marchés spécialisés de la première banque des PME en France, qui a octroyé 20 Md€ de PGE en 2020. Une proportion étonnante, loin de celle des « 40 à 45 % » – toutes banques confondues – retenue par le médiateur du crédit à la Banque de France, Frédéric Visnovsky.

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Matthieu Barry

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