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Levée de fonds : quel est le bon moment ?

La levée de fonds des startuppers peuple les rêves des entrepreneurs. Or, le réveil est parfois déconcertant et beaucoup de questions restent en suspens. Quand faut-il lever des fonds ? Les six intervenants invités à présenter jeudi dernier un panorama des solutions de financement, lors du 26ème Salon des entrepreneurs, ont débattu la question.

Levée de fonds : quel est le bon moment ?
Faut-il lever des fonds lors de la création ou en phase de développement ? Oui et non : « La levée de fond n’est pas une fin en soi », affirme Grégory Clément.

Gage de réussite et promesse d’un bel avenir, la levée de fond et ses chiffres ronflants fascinent. Toutefois, comme son nom l’indique, s’attaquer à des fonds de capital-risque dès le moment de la création d’entreprise, est un pari. Plusieurs éléments sont à prendre en compte pour décider d’ouvrir le capital de sa société à des investisseurs. La manière d’aborder une levée de fond diffère par exemple selon l’entrepreneur, les fonds propres, la dimension et la maturité du projet. À cet égard, les trois approches de Bagel Corner, Guestviews et Cityscoot sont éloquentes.

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Pour rappel, la levée de fond est un recours au capital d’investissements extérieurs privés ou publics pour créer ou développer une société (particuliers, business angels ou fonds de capital-risque/capital-amorçage).

« Pas de levée de fonds trop tôt ! »

D’emblée, Max Peuvrier, président du comité financement de l’Ordre des experts-comptables, conseille aux créateurs de « ne pas faire de levée de fond trop tôt ». En effet, il insiste sur le risque de dilution (contrôle, bénéfices, gestion, etc.). Grégory Clément, le cofondateur de Bagel Corner, une franchise spécialisée dans la production de bagel en restauration rapide, abonde. Ce dernier a attendu de posséder quatre restaurants pour partir à la recherche d’un partenaire financier. Avant cela, 10 000 euros par associé (soit 30 000 euros), un apport du board (constitué dès le départ « avec culot »), un prêt Croissance Bpifrance et un passage par la banque CIC.

Selon Max Peuvrier, ces étapes constituent la marche à suivre pour débuter. Il distingue deux niveaux de financement : un premier échelon correspondant aux prêts d’honneurs (prêt d’honneur création PIE par exemple) et à certaines structures puis un second, celui des financements bancaires, de la Bpi France et d’éventuels financements participatifs.

Pour Guestviews, la start-up du livre d’or numérique, la nature du projet a notamment pu permettre à Alizée Doumerc, sa cofondatrice, de gagner des concours, obtenir des prêts, intégrer l’incubateur de Science-po et bénéficier du programme d’investissement d’avenir (PIA). Grâce à son premier client Louis Vuitton, Guestviews a pu grandir. Aujourd’hui, la start-up a effectué trois tours de table et compte d’illustres clients comme le Louvre, la Cité de la Musique, etc.

Levée de fonds : « Boucler la levée au plus vite ! »

En revanche, du côté de Bertrand Fleurose, fondateur de Cityscoot, le premier service de location de scooter électrique en libre-service, tout va très vite. Afin de déployer sa flotte de scooters, l’ancien trader a réalisé une levée de fonds de 15 millions d’euros en juillet 2016. « On prend partout, lance-t-il à propos de la recherche de financement, on ne choisit pas toujours ses investisseurs ». D’ailleurs, il convient de « boucler la levée au plus vite », insiste-il, d’autant plus que la levée de fond s’avère chronophage (6 ou 9 mois).

L’entrepreneur a commencé avec 3 millions d’euros de fonds propres (love money) et bénéficiait d’un investissement non dilutif  (sans céder son capital) pour financer en leasing ses scooters. La Caisse des Dépôts (CDC) a été le premier à rejoindre son tour de table. En février 2018, la RATP et un fond russe se joignent à la danse et le businessman lève 40 millions d’euros (dont 5 à 10 % furent consacrés à la trésorerie).

Pour autant, « Il ne faut pas croire que les financeurs vont se mettre à genoux devant un super projet », prévient-il. Bertrand Fleurose remercie à cet égard Bpifrance qui l’a soutenu à ses débuts. La banque public d’investissement offre « beaucoup d’avances remboursables et ne prête pas qu’aux riches », assure-t-il. Angelina Simoni, directrice régionale Paris de Bpifrance rappelle que « la levée de fond est proportionnelle à la dimension du projet ».

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« La levée de fonds n’est pas une fin en soi »

Or, la dimension du projet évolue et l’entrepreneur n’est jamais à l’abri d’un besoin en trésorerie. Faut-il lever des fonds lors de la création ou en phase de développement ? Oui et non : « La levée de fond  n’est pas une fin en soi », affirme Grégory Clément. Aussi, lorsque celle-ci est envisagée, il convient de ni surestimer ni sous-estimer ses besoins financiers. Lever trop d’argent implique une dilution et davantage de pression, tandis que n’en lever pas assez se révèle être un vrai danger.

Alors, comment lever des fonds et réussir dans l’entrepreneuriat ? « Pas de recette miracle » pour les intervenants qui prodiguent tout de même quelques conseils. Les maîtres-mots : travail, accompagnement et passion d’entreprendre. Bien s’entourer est un élément primordial : « Les investisseurs misent sur l’équipe qui réalisera le business model », affirme Stéphanie Savel, présidente de Financement Participatif France (FPF). Quant à la passion d’entreprendre, il s’agit d’un amour du risque. Selon Bertrand Fleurose, il convient de savoir « prendre le risque au bon moment » et « montrer que l’on est capable ». «  À une semaine près, une décision dans les premières années peut plomber l’entreprise » prévient-il.

Surtout, d’autres solutions de financement alternatives à la levée de fonds existent. Le crowdfunding (ou crowdlending) est un mode de financement à ne pas sous-estimer (ne serait-ce que pour tester un marché ou se faire connaître) même s’il est très sélectif.  Des crédits, prêts, concours, labels, accompagnements, garanties et assurances sont recensés sur les sites bpifrance.fr et bpifrance-creation.fr. Enfin, le « Dispositif Crédit 50 K€ » mis en place par l’Ordre des experts-comptables et la Fédération bancaire française (FBF) facilite l’accès aux financements des TPE/PME.

Matthieu Barry

 

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