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Auto-entreprise : des économistes veulent aller plus loin

Le numérique favorise l’émergence du travail indépendant et notamment l’auto-entrepreneuriat, avance le Conseil d’analyse économique (CAE). Conséquence : ce service placé auprès du Premier ministre préconise de généraliser, dans la limite des seuils, l’auto-entreprise, de soumettre le régime à la TVA, de développer l'accès au crédit ou encore de créer une épargne micro-entrepreneuriale.

Auto-entreprise : des économistes veulent aller plus loin

« Pour supprimer la concurrence avec d’autres formes d’entrepreneuriat individuel, le régime fiscal et social de l’auto-entrepreneur pourrait être rendu accessible à tous pour la partie du chiffre d’affaires située sous le plafond ». C’est l’une des propositions du Conseil d’analyse économique (CAE). Elle revient à revendiquer, notamment, que les professions réglementées puissent opter pour l’auto-entreprise. Mais pas seulement. Plus généralement, l’étude du CAE (voir ci-dessous) veut pérenniser et généraliser ce régime simplifié entré en vigueur en 2009. La raison principale : « l’économie numérique favorise l’émergence du travail indépendant », avancent les quatre auteurs du rapport. Or, selon eux, l’une des explications sous-jacentes trouve ses racines, en ce qui concerne la France, dans l’auto-entreprise.

Critique de la loi Pinel de 2014

Cette étude relance donc le débat sur l’extension de l’auto-entreprise, critiquant au passage ouvertement la politique gouvernementale alors même que le CAE est placé auprès du Premier ministre ! Ainsi, les économistes pointent du doigt la loi Pinel de 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises. « Elle a érodé la simplicité du dispositif et exposé inutilement l’auto-entrepreneur à des barrières corporatistes (obligation d’immatriculation au répertoire des métiers ou au Registre du commerce et des sociétés, suppression de la dispense de stage de préparation à l’installation) », argumente le CAE. Rappelons qu’à l’origine, Sylvia Pinel voulait même diviser quasiment par deux les seuils de l’auto-entreprise. Avant de faire marche arrière.

Cumul avec la fonction publique

Les quatre auteurs de l’étude, Nicolas Colin, Augustin Landier, Pierre Mohnen et Anne Perrot, souhaitent que l’auto-entreprise soit cumulable avec d’autres formes d’emploi, y compris dans la fonction publique précisent-ils. Une position opposée à celle du gouvernement. Le projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, en discussion parlementaire depuis mi-2013, veut interdire aux fonctionnaires à temps complet d’exercer aussi une activité entrepreneuriale et notamment sous le régime de l’auto-entrepreneur.

Applications de comptabilité spécialisées

Le CAE propose aussi de faciliter le passage, « sans surcroît de complexité administrative », dans des régimes plus adaptés au-delà des seuils applicables. Pour y parvenir, il recommande de confier « aux administrations fiscales et sociales la mission de déployer des infrastructures logicielles accessibles via des API (application programming interface) de comptabilité spécialisées (opérées par les plates-formes de l’économie collaborative ou par des tiers) ».

Régime spécifique de TVA pour les auto-entreprises

En échange de ce développement de l’auto-entrepreneuriat, le CAE veut réduire la distorsion fiscale liée à l’exemption de TVA. Les auto-entrepreneurs factureraient une taxe sur les ventes à « taux faible » laquelle serait reversée en même temps que les cotisations sociales, « le prélèvement restant unique mais à taux plus élevé », préconisent-ils. Ils prévoient même, pour faciliter la vie des auto-entrepreneurs et lutter contre la fraude, que les plate-formes d’intermédiation se chargent de réaliser elles-mêmes l’ensemble des prélèvements.

Meilleur accès au crédit

La question des conditions de vie des auto-entrepreneurs est également abordée, en partie. Les économistes soulèvent les questions de l’accès difficile au crédit, au logement et à l’épargne pour ces indépendants. Pour y remédier, ils proposent de rendre portables les données, notamment bancaires pour « permettre à des entreprises privées d’établir un scoring automatisable du risque crédit des travailleurs indépendants, sur la base de leur historique d’activité et de paiements, et donc d’atténuer les asymétries d’information qui ferment les marchés du logement et du crédit aux personnes non signataires d’un CDI ». Ils préconisent également de créer un dispositif d’épargne micro-entrepreneuriale sur le modèle de l’épargne salariale. « Ce papier du CAE est excellentissime, apprécie-t-on du côté de l’UAE (Union des auto-entrepreneurs). Il ouvre le débat pour savoir comment rendre le travail indépendant plus juste, mieux protégé et mieux attractif », ajoute cette organisation. Un débat qui pousse les politiques à réfléchir. Selon le CAE, la part des non-salariés dans l’emploi total se redresse depuis 2001 alors qu’elle était en recul depuis les années 1970. En 2012, on recensait 10,8 % de non-salariés parmi les actifs en France, selon l’Insee. Dans l’Union européenne, on en dénombrait 33,1 millions, soit 15 % de la population active.

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