Actu

Indépendants ubérisés : un amendement relance le débat

La protection sociale des travailleurs indépendants a été l’un des sujets polémiques évoqués ce 17 juillet, lors de la réunion inédite entre Emmanuel Macron et les partenaires sociaux. Décryptage de cette problématique juridique majeure qui va chambouler le monde de l’auto-entrepreneuriat.

Indépendants ubérisés : un amendement relance le débat

Lors de la Coupe du Monde, les supporters des bleus ont attendu longtemps leurs pizzas… Le Collectif des Livreurs Autonomes Parisiens (Clap) a appelé les livreurs des plateformes numériques à faire grève du 8 au 15 juillet, date du match final de la compétition. Gros problème : ce mouvement a du mal à se faire entendre puisque les livreurs,  micro-entrepreneurs, se font remplacer rapidement lorsqu’ils ne répondent pas aux exigences des plateformes. C’est d’ailleurs l’une des raisons de la grève des livreurs, qui s’estiment exploités par les Uber, Foodora et autres Deliveroo. Un sentiment accru par l’amendement du projet de loi « Avenir Professionnel », dont le texte est examiné par le Sénat depuis le 10 juillet 2018.

Netpme Premium Abonnement
Passez à l’action :

Netpme Premium Abonnement

Une charte critiquée

L’amendement qui fait débat est décrit par le gouvernement comme visant « à définir un cadre responsable pour les relations entre les plateformes de mise en relation par voie électronique et les travailleurs qui les utilisent. » Il propose la rédaction d’une charte par les plateformes, élaborée « en tenant compte des contraintes et des spécificités de leur modèle économique ». Elle sera annexée au contrat de prestation de service signé par le micro-entrepreneur.

Deux droits réservés jusqu’à maintenant aux salariés seront octroyés aux travailleurs indépendants de cette plateforme. Ils verseront désormais une contribution formation professionnelle et leurs frais relatifs à la validation des acquis de l’expérience seront remboursés. Aussi, selon le chiffre d’affaires de la plateforme, ils bénéficieront d’un abondement sur leur compte personnel de formation « dans les mêmes conditions qu’un salarié à plein-temps » précise l’amendement.

« Un nouveau statut fragiliserait le marché du travail »

Mais ces propositions ne convainquent pas les principaux intéressés, ni les partenaires sociaux. Les micro-entrepreneurs jugent ces mesures trop favorables aux plateformes, d’autant que la mise en place d’une charte ne sera pas une obligation. De leur côté, les plateformes craignent que cette charte, qui sera « opposable aux parties » leur fasse du tort : les micro-entrepreneurs pourront réclamer en justice une transformation de leur contrat d’indépendants en CDI.

L’Observatoire du Travail Indépendant (OTI), partage dans un communiqué ses propres recommandations : il propose de collaborer avec l’État pour mener un travail d’analyse ainsi qu’une période d’expérimentation. L’organisation qui étudie depuis avril 2018 l’impact du travail indépendant s’affirme comme « totalement opposée à la création d’un nouveau statut juridique » pour ces micro-entrepreneurs en contrat avec des plateformes numériques. Selon elle, cette action fragiliserait davantage le marché du travail. « L’OTI prône une plus grande convergence des droits mais également la mise en place de dispositifs visant à permettre aux travailleurs indépendants d’accéder par exemple, à un logement ou au crédit », écrit-elle sur son communiqué du 17 juillet.

En attendant le mot de la fin…

Le gouvernement donnera-t-il raison à ces « salariés déguisés » ? Une chose est sûre, la question faisait partie de la liste de sujets à aborder du patron de la CFDT, Laurent Berger, lors de l’échange entre le Président de la République et les principaux responsables syndicaux et patronaux. Patience donc. En attendant, les plateformes continuent de se développer : Uber s’implante dans 14 nouvelles villes touristiques françaises cet été (comme Deauville ou La Baule), Deliveroo installe à Saint-Ouen (93) des cuisines partagées pour permettre aux jeunes restaurateurs de développer leur business et Just Eat annonce qu’elle livrera les vacanciers directement sur les plages tout l’été.

 

Melissa Carles

Laisser un commentaire

Suivant