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PLF 2018 : l'augmentation du plafond des micro-entreprises inquiète les artisans

Bruno Lemaire a annoncé cet été que l’augmentation du plafond des micro-entreprises serait inscrite dans le projet de loi de finances pour 2018. Il est actuellement de 33 100 euros annuels dans les services et 82 800 euros pour les activités commerciales. Il sera plus que doublé. La Fedae applaudit, la FFB y est hostile, comme l’U2P qui réclame un rendez-vous avec Bercy.

PLF 2018 : l'augmentation du plafond des micro-entreprises inquiète les artisans

« Pourquoi casser ce qui marche ? », demande l’ Union des entreprises de proximité en réaction à la déclaration du ministre de l’économie et des finances qui a l’intention de doubler les plafonds de chiffre d’affaires autorisés pour les micro-entreprises. L’U2P a de nombreux griefs envers le dispositif qui, selon lui,  «  a mis un coup d’arrêt au développement des entreprises de droit commun … Souffrant d’un manque de transparence, le régime de l’auto-entreprise a suscité une multiplication des comportements frauduleux ».

Augmentation des plafonds égale augmentation du travail dissimulé ?

Le franchissement annoncé du seuil actuel, est considérable. A tel point que la  FFB juge « totalement  contreproductive » cette augmentation. Aujourd’hui, le plafond est de 82 800 euros pour le commerce ou 33 100 euros pour les prestations de services. En 2018, avec l’augmentation classique annuelle de ces plafonds, et leur doublement, les seuils vont passer à 170 000 euros pour le commerce et 70 000 euros pour les services. Pour Jacques Chanut, président de la FFB, « cette augmentation  –  sans contrôle supplémentaire – a toutes les chances d’aboutir à une augmentation du travail au noir. L’auto-entreprise ne renouera avec sa vocation première, à savoir un tremplin vers l’entrepreneuriat, que si et seulement si des garde-fous suffisants et contrôlés sont bien respectés. Ce n’est actuellement pas le cas ». La CPME renchérit : « les auto-entrepreneurs bénéficient de conditions fiscales et sociales spécifiques, ce qui génère, dans certains secteurs, une concurrence déloyale inacceptable par rapport aux autres formes sociétales, et en particulier les artisans ».  En d’autres termes, elle considère que si la mise en place du statut d’auto-entrepreneur « a contribué à développer l’entrepreneuriat en France, elle a également fragilisé des pans entiers de notre économie qu’il s’agisse des services ou du bâtiment ». « Ne nous trompons pas : une France d’auto-entrepreneurs ne pourrait ni investir massivement ni embaucher », gronde-t-elle.

Un retour aux préconisations du rapport Grandguillaume

« Nous ne voulons pas revenir sur le débat qui oppose les micro-entreprises aux autres entreprises », temporise Marc Sanchez, secrétaire général du Syndicat des Indépendants (SDI). « Nous sommes également interrogatifs sur cette mesure annoncée par Bercy, car l’assujetissement à la TVA jusqu’à 82 800 euros est une donnée qui réserve le dispositif à certaines activités. Le doublement du plafond a-t-il été pensé pour convaincre les artisans ou les commerçants de passer à la micro-entreprise ? Il faudra étudier les impacts avec les autres statuts. Mais cela va dans le sens du rapport Grandguillaume qui prônait la simplification en partant du principe que le monde de l’entreprise est le même pour tout le monde et qu’on peut évidemment évoluer vers d’autres statuts ». Un rapport qui date de fin 2013 et analysait déjà «  les accusations de concurrence déloyale à l’encontre des auto-entrepreneurs, notamment dans le secteur du bâtiment » en  insistant sur la nécessaire «  fluidité du parcours de l’entrepreneur ».

Seuls 5 % des auto-entrepreneurs dépassent les plafonds actuels

« Cette augmentation est encourageante », estime pour sa part la Fedae (Fédération nationale autoentrepreneur microentrepreneur), puisqu’« il deviendrait possible d’entreprendre une activité qui génère des recettes conséquentes tout en bénéficiant de la simplicité du régime de l’auto-entreprise ». Autre atout : « elle permettrait à certains artisans ou commerçants au régime de droit commun de bénéficier de la simplicité du régime, et ainsi de cesser les oppositions stériles entre régimes ». Avec toutefois des nuances, concède la fédération : « seuls 5% des auto-entrepreneurs dépassent les plafonds actuels et beaucoup se brident pour ne surtout pas franchir la ligne et tomber dans le régime réel ». De plus, indique-t-elle, « les auto-entrepreneurs qui dépassent un chiffre d’affaires de 25 000 euros paient plus de cotisations que les autres régimes : autrement dit, les Français qui choisissent la simplicité la paient cher. En tout cas, plus cher que les entrepreneurs au régime réel. C’est particulièrement vrai pour les activités artisanales ».

Des propositions pour accompagner ce doublement du plafond

Chaque organisation s’empare du projet et propose ses solutions. L’U2P « exige  de toute urgence la tenue d’une réunion de concertation  avec le ministre afin d’éclaircir et de préciser les intentions de Bercy. Quoiqu’il en soit,  l’U2P déclare son opposition absolue à toute augmentation du seuil de franchise de TVA ». La CPME juge qu’  «  il serait sans nul doute plus pertinent d’opérer une distinction entre revenus d’appoint et activité principale. Le statut de micro-entreprise devrait, dans ce dernier cas, être limité à une période de 3 ans avant de passer sous un statut de droit commun, et ce pour éviter un entrepreneuriat à plusieurs vitesses ». Pour la Fedae enfin, « l’augmentation du plafond doit évidemment embarquer le micro-social (fonctionnement simplifié des cotisations sociales) et le micro-fiscal (non assujettissement à la TVA, aussi appelé franchise en base) ». Réponse dans le projet de loi de finances pour 2018 qui sera dévoilé fin septembre.

 Claire Padych

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