Interview

Bruno Bonnell, Président de Robopolis, à Villeurbanne (69)

Longtemps dans la lumière avec sa société Infogrames, Bruno Bonnell développe aujourd’hui dans la discrétion Robopolis, une société spécialisée dans les robots. 25 ans après ses débuts dans l'entrepreneuriat, c'est avec la même passion et la même énergie qu'il porte ce nouveau projet.

Bruno Bonnell, Président de Robopolis, à Villeurbanne (69)

Qu’est-ce que Robopolis ?

C’est une société spécialisée dans la distribution de robots personnels à usage domestique, éducatif ou ludique et dans la création de logiciels pour ces robots. A l’horizon de 15 ans, je suis convaincu qu’il y aura plusieurs robots dans chaque foyer. Le robot apporte en effet une nouvelle dimension des capacités humaines.

Dirigez-vous Robopolis comme Infogrames*?

Robopolis est leader sur la distribution de robots en France, avec dix personnes et un chiffre d’affaires de 5 millions d’euros. Elle se positionne sur un marché en développement à trois chiffres. La croissance est assez spectaculaire. Mais je ne fais pas de copier/coller et je n’ai pas l’esprit revanchard. On n’a jamais deux enfants pareils : la personnalité de chaque entreprise se forme à l’aune des gens qui l’accompagnent.

On ne crée pas une entreprise à 25 ans et à 50 ans avec la même approche ?

Oui, on n’a pas le même état d’esprit. Je cherche à intégrer des jeunes talents et des gens plus expérimentés, pour les laisser s’exprimer. Aujourd’hui, je suis moins le cerveau de l’entreprise mais plus le cœur. Je suis donc moins dans l’opérationnel, mais plus dans l’accompagnement, dans la stimulation. L’expérience permet aussi de prendre des décisions plus rapidement. Et d’admettre que, parfois, la passion ne suffit pas, il faut un peu de raison…

Comment vivez-vous la crise ?

La crise, je n’y crois pas : nous vivons une transformation du corps social et économique, par soubresauts. Nous payons en ce moment la fracture numérique car les entreprises n’ont pas su prendre le virage. Cela crée des mouvements de panique, douloureux, mais aussi très exaltants! Plus que jamais, nous sommes dans le siècle des entreprises. Nous entrons dans une phase de renaissance. La seule chose que je crains c’est que cela crée un climat de néo-guerre, avec pour victimes les gens au chômage, sans habitation…

Pensez-vous que vous saurez gérer la croissance de Robopolis ?

Avec l’expérience, on s’emballe moins dans des financements compliqués. Mais on ne peut pas ignorer les opportunités. Ne pas forcer le destin, vouloir passer en force, mais toujours faire un mélange entre l’intuition et le calcul… Quand j’ai quitté Infogrames, en 2007, le groupe n’avait plus de dettes et du cash. Je pense que j’ai effectué 24 ans de « bons et loyaux services ». Je ne regrette absolument pas les décisions que j’ai prises chez Infogrames, car il y avait besoin d’une certaine forme d’énergie. Aujourd’hui, je suis plus dans l’énergie renouvelable…

Réduire une entreprise à sa performance financière vous agace…

Le profit et l’argent sont essentiels pour assurer la liberté de l’entreprise. Mais il ne faut pas négliger sa performance qualitative. Ce dont je suis le plus fier c’est que 200 entreprises se sont créées à travers Infogrames. Ça a donné le goût d’entreprendre aux gens, alors que dans les années 80 et 90 la création d’entreprise n’était pas commune comme elle l’est devenue aujourd’hui.

Quels conseils donneriez-vous à de jeunes entrepreneurs ?

Trois A m’ont toujours guidé : Axe – il faut un axe de développement et pas seulement une idée -, Argent – pour avoir les moyens de ses ambitions -, et Ames – celles des gens qui adhèrent à la mission de l’entreprise, au-delà du simple fait de gagner de l’argent.

Êtes-vous souvent sollicité par des entrepreneurs ?

Oui, fréquemment, mais je réagis très mal à l’urgence, pour boucler un projet de financement. Je préfère prendre du temps pour aider à monter des projets, en amont. J’ai été business angel quand on n’en parlait pas ; aujourd’hui je concentre mes moyens sur le développement de mes entreprises.

* Ancien fleuron français dans l’univers des jeux vidéo (Alone in the Dark, V-Rally), Infogrames enregistre de lourdes pertes depuis des années. La société vient d’être rebaptisée Atari, du nom de sa filiale américaine et marque mythique. Bruno Bonnell, co-fondateur d’Infogrames en 1983, l’a quittée en 2007.

Propos recueillis par Claire Pourprix – Le Journal des Entreprises

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