Interview

Christian Odin, fondateur et Président de Cresus

Christian Odin, dirigeant de Cresus, enseigne de bijouterie-horlogerie d’occasion de luxe à Lyon, a ouvert le capital de sa société à un fonds d’investissement. Les 800.000 euros injectés ont permis à l’entreprise de booster son développement, notamment via internet.

Christian Odin, fondateur et Président de Cresus

En 2007, vous avez été approché par un fonds d’investissement…

En effet. Commerçant à Lyon, je fais partie du club E-biz regroupant les acteurs du e-commerce, mis en place par la chambre de commerce et d’industrie. C’est au cours d’une conférence mettant en avant les problématiques du commerce et du web que j’ai été approché par un chasseur d’Alto Invest, un fonds d’investissement spécialisé dans les PME. Il a cherché à comprendre le concept Cresus et nos besoins en termes de développement, puis nous a mis en relation avec le fonds.

Comment s’est passée l’entrée au capital ?

J’ai eu la chance d’être en relation directe avec le président. Il y a tout de suite eu un bon feeling : il a rapidement intégré la problématique du marché de la montre d’occasion et compris notre besoin de développement via le web. Très vite, nous sommes rentrés dans le détail opérationnel avec une première lettre d’intention évoquant la prise de participation. Et dans les six mois, l’opération était conclue.

Pour aborder cette démarche, vous êtes-vous entouré de spécialistes ?

Si j’ai un conseil à donner, c’est non seulement de s’entourer, mais aussi de s’adresser à un conseil qui a déjà l’expérience de la levée de fonds. L’étape la plus délicate, c’est la valorisation de l’entreprise. Etant le dirigeant, j’avais évidemment le souci de bien la valoriser. Or, je me suis assez vite aperçu que mon expérience de petit commerçant était limitée. Bien m’en a pris de m’adresser à un spécialiste : par son biais, la valeur de Cresus a augmenté d’environ 15% par rapport à ce qui m’avait été proposé avant. Si le fonds croit en votre projet, il doit pouvoir le valoriser à sa juste valeur…

Avez-vous fait jouer la concurrence avec d’autres fonds ?

Oui, j’ai effectivement été en contact avec un autre, mais on a préféré privilégié Alto Invest par souci d’honnêteté, sachant que les deux offres étaient assez proches.

Aviez-vous des craintes ?

On en a toujours quand on va vers l’inconnu. La principale, c’était de ne pas rester maître chez moi. La solution, c’était de mettre une barrière, que le fonds prenne entre 20 et 30% maximum du capital de l’entreprise. Pour Cresus, elle est de 19%. Au final, il faut quand même se dire qu’il vaut mieux avoir 80% d’un gros navire que 100% d’une coquille de noix…
Malgré tout, ça n’empêche pas la suspicion au regard de ce nouvel associé qu’on ne connaissait pas six mois auparavant. Mais, jusqu’à présent, j’ai été plutôt rassuré : les relations sont cordiales et je n’ai pas seulement affaire à des businessmen. C’est une structure à taille humaine, empreinte d’un esprit entrepreneurial. Et puis l’interlocuteur est toujours le même, ce qui est rassurant. En fait, j’ai même été surpris de la confiance qu’on nous accorde : il y a peu de contrôles. Au quotidien, je suis toujours le Président de ma société, je décide de tout sans avoir à en référer à mon associé, je l’informe juste des grandes lignes de notre stratégie. Il faut dire que le business plan est pour le moment respecté. Nous sommes donc un peu comme un couple en lune de miel. Les périodes difficiles viennent souvent un peu plus tard, c’est alors qu’il faudra être attentif.

Concrètement, qu’est-ce que cette opération a apporté à Cresus ?

800.000 euros ont été injectés pour développer l’activité, notamment le site Cresus.fr. Aujourd’hui, celui-ci réalise plus de 35% des ventes. A terme, nous souhaitons qu’il en représente 50%. Pour y parvenir, nous jouons sur deux leviers. D’abord, pour faire face à la demande, nous avons plus que doublé notre stock, à 1,8 million d’euros : nous proposons en effet plus de 1000 références sur le site. Nous avons également renforcé notre référencement, donc notre visibilité, en recrutant une personne dédiée qui a engagé une série d’actions. Enfin, nous devrions ouvrir un deuxième point de vente, à Paris, au cours du premier semestre 2009.

Comment a été accueillie l’arrivée d’un fonds d’investissement par le personnel ?

Il y a forcément eu des inquiétudes liées à la peur de l’inconnu. Il a fallu informer les salariés, rassurer. Je suis pour la clarté. Finalement, au bout d’un an, c’est vrai qu’on a l’exigence du résultat et de la progression, mais on l’avait déjà avant. Et puis, surtout, ils voient que la stratégie porte ses fruits alors qu’autour les commerçants qui connaissent des difficultés sont nombreux. Non seulement Cresus se porte bien – l’objectif de 5 millions d’euros pour l’exercice 2008 devrait être atteint – mais nos produits sont plutôt des produits de crise. D’ailleurs, octobre a été un mois excellent et novembre suit la même courbe. Nous sommes sur un marché qui se développe, le web, et l’achat malin est dans l’air du temps.

Propos recueillis par Nelly Lambert
Rédaction de NetPME

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