Interview
Laure Vigliano, consultante et formatrice en commerce international, Le Perreux sur marne (94)
Forte d’une expérience de 20 ans en développement international, Laure Vigliano est à son compte depuis trois ans. Elle accompagne les PME, primo-exportatrices ou non, dans une démarche stratégique pour leur développement, mais qui cache aussi de nombreux pièges…
Quelles sont les problématiques spécifiques aux PME dans une démarche export ?
95 % du commerce mondial se fait en dehors de la France. Cela implique pour les entreprises de chercher et trouver des relais de croissance par rapport à un marché domestique où les PME sont généralement bien implantées. Le problème, c’est que souvent c’est le patron qui s’occupe de l’international, contrairement à une plus grosse structure qui aura son assistante export. Or, la plupart du temps, le dirigeant d’une PME n’a pas toutes les compétences marketing, juridiques… nécessaires. Sans compter qu’il ne parle pas forcément bien l’anglais…
C’est aussi une question de temps : les patrons de PME ont autre chose à faire que de se perdre dans les dédales des administrations françaises. Or, il est essentiel d’en passer par là pour avoir accès aux aides et subventions qui vous permettront de limiter les coûts. Il faut savoir qu’une PME peut être aidée jusqu’à 50 % dans sa démarche à l’international, entre le crédit d’impôt export, les aides pour traduire un site internet en anglais ou pour participer à un salon… Je constate que les PME manquent cruellement d’informations en matière de commerce international : elles ne sont absolument pas conscientes de tout ce qui existe pour les aider, contrairement aux entreprises allemandes par exemple. Il y a un vrai travail d’évangélisation à faire.
Quelles sont les clés pour réussir à l’international. Y a-t-il une recette ?
Le premier critère, c’est d’avoir une offre différenciante. Cela peut être une innovation technologique ou une nouvelle approche de service client, mais il faut en tout cas avoir quelque chose de nouveau à apporter au marché.
Cela implique au préalable d’avoir identifié sa valeur ajoutée par rapport au marché cible car à l’export, personne ne vous attend.
Il faut savoir que le développement international, c’est avant tout un investissement et que celui-ci doit être effectué au bon moment.
A l’inverse, quels sont les dangers qui guettent une PME ?
Souvent, elles n’ont pas de stratégie internationale. Elles font du développement par opportunités parce qu’une personne est venue à elles, sans prendre le temps de savoir qui est cette personne. Quand on a cette logique, le risque c’est de signer un contrat d’un an avec quelqu’un qui vous promettra monts et merveilles. Sauf qu’il ne se passera rien parce qu’en fait votre concurrent va envoyer un agent ou un distributeur qui aura pour mission de bloquer votre démarche.
Ca ne veut pas dire qu’il ne faille pas saisir les opportunités, mais ces opportunités doivent être étudiées, travaillées. Il convient de vérifier scrupuleusement le profil, les compétences et les motivations de ses contacts et pour cela il existe des outils. Vous devez par exemple demander le « company profile », plaquette détaillée de présentation de l’entreprise qui s’adresse à vous. Et si la personne qui vous démarche ne peut pas vous le fournir, elle doit en tout cas pouvoir répondre à des questions très précises.
Autre piège classique : lors du dépôt de marque. Les PME trouvent souvent que c’est trop cher de déposer la marque dans chaque pays. Or, il y a des petits malins qui regardent les marques qui montent et qui les déposent dans leur pays. Ce qui fait qu’au moment où vous voudrez y exploiter votre marque, vous devrez racheter le dépôt de la marque pour une somme exorbitante ! Cela peut conduire à un procès, procédure longue et coûteuse… Le dépôt de marque nécessite donc des arbitrages budgétaires qui ne sont pas évidents à faire, mais qui se révèlent indispensables. Une fois que c’est trop tard, l’investissement devient exponentiel, alors qu’il s’agit d’exploiter sa propre marque !
Quels sont les pays les plus sollicités pour un développement à l’international aujourd’hui ?
En ce moment, on perçoit une très forte poussée de la Corée du Sud. D’ailleurs, un accord de libre échange entre l’Union européenne et ce pays a été signé (l’accord doit prendre effet le 1er juillet 2011, après sa ratification par les Parlements européen et coréen, NDLR). Sinon, on reste quand même sur l’Europe élargie et les marchés de proximité.
De manière générale, il n’y a pas de règle concernant le choix d’un pays pour un primo exportateur. Parfois, il vaut mieux être fort sur le marché domestique, parfois non. Parfois, il vaut mieux commencer avec les marchés de proximité, mais parfois les Allemands se désintéresseront de votre produit alors que les Japonais flasheront dessus. La seule règle à suivre, c’est celle qui consiste à ne pas se mettre de barrières, tout en ayant une méthodologie.
De quelle manière pouvez-vous aider les PME ?
J’agis comme une responsable export externalisée qui ne vient pas augmenter la masse salariale de l’entreprise et qui est immédiatement opérationnelle. Je travaille avec les entreprises aussi bien à construire leur stratégie internationale qu’à mettre celle-ci en œuvre au travers d’un plan d’actions.
Dans le cadre d’une ouverture de marché par exemple, je vais aller chercher les aides et subventions, identifier les distributeurs, les partenaires, m’occuper du dépôt des marques. Ma présence est à géométrie variable, en fonction des besoins : cela peut être pour trois semaines, quatre mois ou un an et demi.
Propos recueillis par Nelly Lambert
Rédaction de NetPME
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