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La Cour de cassation sécurise la réforme de la représentativité syndicale

La Cour de cassation vient de réaffirmer le principe selon lequel le seuil de 10 % est exigé pour qu'un syndicat soit reconnu représentatif et puisse être désigné délégué syndical.

Dans un arrêt très attendu, la Cour de cassation juge que l’obligation de recueillir 10 % des suffrages aux élections professionnelles pour obtenir la qualité de syndicat représentatif et être désigné délégué syndical n’est pas contraire à la liberté syndicale. La chambre sociale casse ainsi le très médiatique jugement du tribunal d’instance de Brest qui avait jeté le doute sur le cœur même de la réforme de la représentativité syndicale issue de la loi du 20 août 2008.

En 2009, le syndicat FO n’avait obtenu au premier tour des élections professionnelles organisées dans l’entreprise SDMO Industries, que 7,01 % des suffrages exprimés, tous collèges confondus. Malgré ce score, le syndicat avait désigné un délégué syndical. Une désignation contraire aux nouvelles dispositions légales relatives à la représentativité syndicale issues de la loi du 20 août 2008. Aux termes de la loi, en effet, seuls les syndicats représentatifs, c’est-à-dire ayant obtenu au premier tour des élections professionnelles au moins 10 % des suffrages exprimés, peuvent désigner un délégué syndical. En outre, ne peut être désigné comme délégué syndical qu’un candidat ayant recueilli sur son nom au moins 10 % des suffrages exprimés. En l’espèce, aucune de ces conditions n’était remplie. L’employeur et la CFDT avaient donc saisi le tribunal d’instance de Brest afin de faire annuler la désignation du délégué syndical FO. Pour FO, le combat semblait perdu d’avance.

Et, pourtant, contre toute attente, le tribunal d’instance de Brest a validé la désignation du délégué syndical FO. Se fondant notamment sur l’article 11 de la Convention européenne des droits de l’homme sur la liberté syndicale, le tribunal a jugé que « l’obligation de choisir le délégué syndical parmi les candidats ayant obtenu au moins 10 % est contraire au principe de la liberté syndicale et constitue une ingérence dans le fonctionnement syndical ». Il a également estimé discriminatoires et contraires aux règles communautaires les dispositions de la loi de 2008 qui permettent à la CFE-CGC, syndicat catégoriel, d’être représentative en n’obtenant 10 % des voix que dans le seul collège où elle se présente, celui des cadres, mais qui ne permettent pas à un syndicat intercatégoriel, tel FO, qui a obtenu plus de 10 % des voix sur le collège où il a présenté une liste, d’être représentatif pour les salariés de ce collège.

En remettant en cause la réforme de la représentativité syndicale, le jugement avait fait l’effet d’un coup de tonnerre tant dans le milieu syndical qu’au sein du gouvernement. Craignant sans doute la contagion, Xavier Darcos, alors ministre du Travail, avait aussitôt indiqué que le jugement du tribunal de Brest ferait l’objet « dans les plus brefs délais d’un recours en cassation ». Dans ce contexte, on comprend que la décision de la Cour de cassation était très attendue.

Deux questions étaient posées à la Cour Suprême : le seuil de 10 % exigé d’un syndicat pour être reconnu représentatif et être désigné délégué syndical est-il contraire à la liberté syndicale ? La loi du 20 août 2008 institue-t-elle une inégalité de traitement entre syndicats catégoriels et non catégoriels en permettant à un syndicat catégoriel d’être représentatif avec 10 % des voix dans le seul collège où il se présente tout en interdisant à un syndicat non catégoriel ayant obtenu plus de 10 % des suffrages sur un seul collège d’être représentatif pour les salariés de ce collège ?

A la première question, la Cour de cassation répond très clairement que « l’obligation faite aux syndicats représentatifs de choisir, en priorité, le délégué syndical parmi les candidats ayant obtenu au moins 10 % des voix ne heurte aucune prérogative inhérente à la liberté syndicale ». Elle va même plus loin en affirmant que « tendant à assurer la détermination par les salariés eux-mêmes des personnes les plus aptes à défendre leurs intérêts dans l’entreprise et à conduire les négociations pour leur compte, elle ne constitue pas une ingérence dans le fonctionnement syndical ». La Cour de cassation casse donc le jugement du tribunal de Brest avant même d’avoir répondu à la seconde question portant sur la discrimination entre syndicats catégoriels et non catégoriels.

Nul doute néanmoins que cette question reviendra à nouveau devant les juges. La réforme de la représentativité syndicale n’a pas fini de faire parler d’elle…

Source : Cass. soc., 14 avril 2010, pourvois n° S 09-60.426 et V 09-60.429

Nathalie Lepetz
Rédaction de NetPME

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