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La Cour de cassation ne considère pas forcément Facebook comme un lieu public

Dans un arrêt du 13 avril dernier, la Cour de cassation juge que les propos publiés sur un compte Facebook ou MSN ne constituent pas des injures publiques dès lors qu’ils ne sont accessibles qu’aux seules personnes agrées par l’intéressé, en nombre très restreint.

La Cour de cassation ne considère pas forcément Facebook comme un lieu public

C’est la première fois que la Cour de cassation tranche la question du caractère privé ou public des propos tenus par un salarié sur les réseaux sociaux, Facebook et MSN en l’occurrence. Et la question est d’importance car du caractère public ou privé des propos litigieux dépendra la qualification de l’infraction retenue et donc la gravité des sanctions prononcées. Publics, les propos constituent un délit puni d’une amende de 12 000 euros. Privés, ils ne constituent qu’une contravention de première classe passible d’une amende de 38 euros.

Facebook « n’est pas un lieu public » pour la Cour de cassation…

Dans cette affaire, une entreprise et sa gérante avaient assigné une ancienne salariée en paiement de dommages et intérêts pour avoir publié sur divers réseaux sociaux des propos qualifiés d’injures publiques à l’encontre de sa hiérarchie. Leur demande est rejetée par la cour d’appel puis la Cour de cassation. Pour les magistrats, les propos litigieux avaient été diffusés sur les comptes Facebook et MSN de la salariée, lesquels n’étaient en l’espèce accessibles qu’à ses seuls « amis » ou « contacts ». Ces « amis » et « contacts », peu nombreux et agréés formaient une « communauté d’intérêt », de sorte que les propos auxquels ils avaient accès ne constituaient pas des injures publiques.

 … à condition que les « amis » de vos « amis » ne soient pas vos « amis »

Cette décision de la Cour de cassation apporte d’utiles éclaircissements. Jusqu’à présent, une certaine confusion régnait au sein des tribunaux, peu aidés, il est vrai, par un Code du travail qui se trouva fort dépourvu face à l’arrivée de Facebook, MSN et autre Twitter. 

 C’est le Conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt qui fut l’une des premières juridictions à se prononcer sur la question. Fin 2008, trois salariés avaient publié sur la page personnelle Facebook de l’un d’eux des propos dénigrant leur entreprise. Deux d’entre eux avaient été licenciés pour faute grave et le conseil des prud’hommes de Boulogne-Billancourt avait jugé que leur licenciement était justifié. A l’appui de leur décision, les juges avaient constaté que le salarié avait choisi dans le paramètre de son compte de partager sa page Facebook avec « ses amis et leurs amis » permettant ainsi un accès ouvert, notamment par les salariés ou anciens salariés de la société (Cons. prud. Boulogne-Billancourt, 19 novembre 2010, n° 09/00316 et 09/00343). D’autres décisions suivront. Ainsi, la cour d’appel de Reims statue dans le même sens à propos du message publié par un salarié sur le mur d’un de ses amis  et dont le compte avait été paramétré pour en permettre l’accès aux « amis de ses amis » (CA Reims, 9 juin 2010 n° 09-3209). Même sanction pour la cour d’appel de Besançon qui a jugé fondé le licenciement d’une salariée qui avait publié sur le mur Facebook d’un ancien collègue des propos désobligeants à l’égard de son entreprise (CA Besançon, 15 novembre 2011 n° 10-02642).

Facebook doit donc être considéré, au regard de sa finalité et de son organisation, comme un espace public. Il appartient en conséquence à celui qui souhaite conserver la confidentialité des propos qu’il tient sur ce réseau soit d’adopter les fonctionnalités adéquates offertes par ce site, soit de s’assurer préalablement auprès de son interlocuteur qu’il a limité l’accès à son « mur ». S’il n’a pris aucune de ces précautions, il pourra difficilement soutenir que les propos qu’il a tenus relèvent de la sphère privée.

 Cass. civ. 13 avril 2013, n° 11-19.530 

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