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Travail dominical : le rapport Bailly propose des compensations salariales étendues

Jean-Paul Bailly, l'ancien PDG de La Poste, a remis lundi au Premier ministre son rapport sur le travail dominical. Il propose la création de nouveaux périmètres de dérogation dans les zones touristiques et commerciales assortis de compensations salariales identiques pour tous les salariés. Une loi devrait être adoptée au cours de l'année 2014.

Travail dominical : le rapport Bailly propose des compensations salariales étendues

Je partage les principes fondamentaux qui sont mis en avant dans ce rapport », a dit le Premier ministre en recevant hier les propositions sur le repos et le travail dominical de l’ancien PDG de la Poste, Jean-Paul Bailly. « Le dimanche n’est pas un jour comme les autres et nous ne souhaitons surtout pas qu’il le devienne », a insisté Jean-Marc Ayrault.
Pas de banalisation du travail dominical donc mais une remise en ordre des dérogations autour de plusieurs axes

De nouveaux périmètres de dérogation fondés sur le dialogue territorial

Les demandes de dérogations au repos dominical répondent schématiquement à deux besoins : ceux du commerce et ceux du tourisme. A l’heure actuelle ce sont les périmètres d’usage de consommation exceptionnelle (PUCE) et les zones touristiques qui sont censés y répondre. Mais le rapport Bailly adresse un certain nombre de reproches aux deux dispositifs existants : ne pas tenir compte des spécificités territoriales, avoir régularisé des pratiques d’ouverture illégale et n’avoir pas agi de manière suffisamment encadrée et concertée.
Pour les remplacer, le rapport Bailly propose la mise en place de deux types de périmètre :
– les périmètres d’animation concertés commerciaux (PACC) ;
– les périmètres d’animation concertés touristiques (PACT).
La création des ces périmètres relèvera d’un accord entre les acteurs territoriaux (élus, administration et acteurs économiques, les partenaires sociaux n’étant que concertés sur la question). Le préfet de département devra s’assurer de la cohérence de la zone ainsi définie. Par exemple, une zone créant des effets de bord et de distorsion de concurrence flagrantes ne devrait pas pouvoir être validée.

Que deviendront les PUCE ?
Les PUCE, remplacés par les PACC, s’éteindront d’eux-mêmes par le non-renouvellement des autorisations individuelles déjà accordées au moment de leur échéance.

Des critères objectifs cumulatifs serviront de base pour la délimitation des PACC : densité commerciale , attractivité, caractère exceptionnel de l’attractivité commerciale du périmètre, adhésion des commerçants, éléments consultatifs permettant de mesurer l’adhésion des salariés… A noter que les gares et les centres commerciaux pourraient faire partie des PACC.
Une fois ce périmètre défini et approuvé, les commerçants situés dans ces zones n’auront pas à solliciter de dérogations spécifiques. Les dérogations seront de droit.

Des contreparties salariales étendues pour le travail dominical

Toutefois, un accord collectif de branche, d’entreprise ou de site sera nécessaire ; l’accord devra fixer les contreparties accordées aux salariés.  A défaut d’accord, les mesures pourront être fixées unilatéralement par l’employeur mais devront être approuvées par référendum des salariés.
Dans tous les cas, la loi fixera le socle minimum de garanties pour les salariés : compensations salariales (jusqu’à présent seuls les salariés des PUCE en bénéficiaient ; ceux des zones touristiques en étaient exclus), repos compensateur, respect du volontariat, mesures visant à faciliter la conciliation entre vie privée et vie professionnelle (aides au mode de garde ou aux transports).
Le volontariat devra donc être la règle. Le salarié devra faire une déclaration positive à échéance régulière qui attestera de sa démarche volontaire (tous les 6 mois ou tous les ans par exemple). Le travail dominical « ne devra pas être une clause du contrat de travail », précise le rapport. Toutefois on voit mal comment les parties pourraient faire l’impasse sur un avenant au contrat de travail. Ce que confirme Etienne Pujol, avocat associé au sein du cabinet Granrut. « Il faudra un avenant dédié. A l’échéance du terme, le renouvellement pourra être décidé ou non, avec éventuellement un préavis ».
Enfin, l’organisation du travail le dimanche ne doit pas nécessiter la présence de la totalité des salariés travaillant la semaine (fonctionnement en équipe restreinte, recrutement de salariés supplémentaires,…)
 

Commerces de moins de 11 salariés
Afin de protéger les petits commerçants, l’obligation de compensation salariale et le volontariat pourraient ne pas être appliqués aux entreprises de moins de 11 salariés. Cela concernerait uniquement les zones touristiques, le rapport soulignant que les petits commerçants  indépendants sont souvent très nombreux dans les zones touristiques et quasiment absents dans les zones commerciales.

 

Davantage de dérogations accordées par le maire 

Le rapport Bailly souligne l’unanimité des acteurs auditionnés pour dire que les 5 dimanches du maire sont insuffisants, dimanches qui sont majoritairement utilisés pour les 4 dimanches du mois de décembre et le premier dimanche des soldes de janvier.Le rapport Bailly propose de passer à 12 jours. « C’est la seule mesure transversale qu’on propose et qui règle un certain nombre de problèmes », a-t-il expliqué. Afin d’éviter des distorsions entre mairies, le choix a été fait de répartir ces jours ainsi : 7 pour le maire et 5 à la main des commerçants. Il n’y aurait toujours pas de volontariat mais un haut niveau de compensation serait maintenu (doublement du salaire et attribution d’un repos équivalent au temps travaillé le dimanche).

Le bricolage n’entrera pas dans la liste des dérogations de droit et l’ameublement en sortira

Enfin le rapport Bailly a dû trouver une solution pour la délicate question du secteur du bricolage qui a mis le feu aux poudres. Il ne sera pas ajouté à la liste de dérogation de l’article R.3132-5 du code du travail. Jean-Paul Bailly préconise au contraire une liste resserrée « qui répond à des exigences opérationnelles et à des nécessités de service ». Jean-Paul Bailly s’en est justifié.  » Il ne faut pas poursuivre les dérogations par secteur car il y a une porosité entre les commerces ; la notion de secteur n’a plus de sens aujourd’hui ».
Toutefois, le bricolage bénéficiera d’une dérogation temporaire jusqu’au 1er juillet 2015 pour les magasins d’Ile-de-France, date qui correspond à un délai de 6 à 12 mois après l’entrée en vigueur de la loi instaurant les nouveaux dispositifs. Le rapport Bailly souhaite toutefois que ce décret soit conditionné au désistement par les enseignes de bricolage de toutes les instances contentieuses en cours. Par ailleurs des compensations salariales devront être prévues.
Afin de rétablir une certaine équité, l’ameublement lui-même ne pourra plus bénéficier de cette dérogation de droit dans les 6 à 12 mois qui suivront l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, « le temps que ce secteur puisse bénéficier de ce nouveau dispositif ». Mais le rapport Bailly temporise : en Ile-de-France, le nouveau dispositif ne devrait rien changer ; les magasins aujourd’hui ouverts devraient le rester.

Pas de changement pour les commerces alimentaires
Les commerces alimentaires sont autorisés à ouvrir le dimanche jusqu’à 13 heures. Ce point là ne changera pas.

 

Une loi annoncée pour 2014

Le rapport Bailly doit désormais être concrétisé au niveau législatif. Une concertation va s’ouvrir avec les partenaires sociaux avant l’adoption d’une loi au cours de l’année 2014.

 

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