Interview

Christine Defretin, co-fondatrice et gérante de Vent de Voyage, à Saint-Malo

« La nouvelle destination des voiles de retour au port », peut-on lire sur la page d’accueil du site Vent de Voyage, qui vend, parallèlement à la boutique installée à Saint-Malo, des sacs et articles de décoration fabriqués à partir d’anciennes voiles marines. Malgré un concept original, la partie n’est pas encore gagnée pour la gérante, Christine Defretin.

Christine Defretin, co-fondatrice et gérante de Vent de Voyage, à Saint-Malo

Vous donnez une nouvelle vie aux voiles marines. Comment vous est venue cette idée ?

A l’origine de Vent de Voyage, en 2000, il y avait trois personnes : mon mari, ancien navigateur, une amie qui travaillait dans la voilerie, et moi qui étais architecte. L’idée de recycler des voiles existait déjà aux Etats-Unis : nous avons souhaité l’adapter en France en ouvrant un atelier-boutique au cœur de Saint-Malo. Mon mari allait beaucoup sur les chantiers, les ports pour récupérer des voiles et nous, on les transformait en sacs, cabacs, puis, très vite, en objets de décoration.

Le concept a-t-il trouvé son public ?

Au bout d’un an et demi, nous avons fait un premier bilan. Verdict : l’affaire n’était pas rentable. Pourtant, j’étais payée à temps partiel et mon mari pas du tout… Notre amie a décidé de ne pas poursuivre. L’aventure était mal engagée, mais c’est alors que nous avons bénéficié de l’effet 35 heures. Les touristes se sont mis à faire de plus en plus de week-ends prolongés à Saint-Malo, en toutes saisons.
Parallèlement, nous avons bénéficié d’une médiatisation en deux temps. D’abord, dans la presse bretonne, grâce à l’obtention d’un trophée de l’innovation. Cela nous a apporté un premier ballon d’oxygène. Puis, à l’occasion du départ de la Route du Rhum en 2002, nous avons bénéficié d’une médiatisation nationale en étant partenaires d’un bateau. Nous avons reçu Tokia Saïfi, secrétaire d’État chargée du Développement durable et bénéficié d’un reportage sur Télématin. Après ce coup de projecteur, nous avons dû répondre à une forte demande.

Le début d’une belle ascension ?

Entre 2004 et 2005, la croissance a été très importante : nous avons attaqué les marchés régionaux, bénéficié de commandes spéciales par des entreprises et des institutionnels. Mais l’hiver suivant, l’activité a baissé brutalement, plusieurs commandes enregistrées n’ont pas été confirmées. On avait fait des investissements, embauché. Au printemps 2006, il a fallu faire marche arrière et licencier deux des trois couturières que comptait l’atelier…

Avec le recul, comment expliquez-vous ce brusque arrêt de croissance ?

Nous avons commis plusieurs erreurs. D’abord, nous n’avions jamais eu de trésorerie, choisissant de nous développer par fonds propres : nous l’avons payé cher car nous avons dû faire face à un découvert énorme. Par ailleurs, nous avons eu des problèmes avec une apprentie, ce qui a mis une très mauvaise ambiance au sein de l’entreprise, démobilisant tout le monde. Enfin, nous étions installés dans une pépinière et il a fallu en partir au mauvais moment.

Quels moyens avez-vous mis en place pour sortir votre activité de la crise ?

Aujourd’hui, nous remontons doucement la pente mais, à l’époque, nous sommes pratiquement repartis de zéro. Le prix de revient de nos produits est important car nous faisons du travail artisanal : la conception d’un sac nécessite une heure pour le plus simple et jusqu’à quatre heures pour les sacs de voyage, plus compliqués. Nous étions confrontés depuis un an à des problèmes de stocks, travaillant uniquement sur commande. Du coup, nous nous réorganisons afin de sous-traiter certaines tâches chronophages. Nous avons également gagné du temps grâce au regroupement de nos activités sur deux sites au lieu de trois.
Désormais, l’une de nos priorités est de développer l’activité web qui correspond bien à nos produits en termes de diffusion. Aujourd’hui, les ventes par ce biais ne sont pas encore probantes – 10 à 15 % du chiffre d’affaires – mais il y a un vrai potentiel, surtout depuis que nous avons installé dans la boutique une webcam pour montrer nos produits.
Les résultats commencent à se faire sentir : cette année on a réalisé 113.000 euros de chiffre d’affaires, en augmentation de 12% par rapport à l’exercice précédent. L’entreprise compte aujourd’hui trois personnes, auxquelles s’ajoutent un poste de comptabilité d’une journée par mois par le biais d’un groupement d’employeurs et mon mari qui a repris d’autres activités…

Propos recueillis par Nelly Lambert
Rédaction de NetPME

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