Interview

Gilles Cibert, directeur de l’hôtel La Pérouse

 Repreneur, il y a cinq ans, de l’hôtel trois étoiles La Pérouse, à Nantes, Gilles Cibert a pris le parti de faire profiter son établissement de l’intelligence économique. Son idée ? Anticiper les menaces concurrentielles et repérer le plus tôt possible les évolutions de son secteur.

Gilles Cibert, directeur de l’hôtel La Pérouse

Vous vous intéressez de près à l’intelligence économique…

Je fais partie du centre des jeunes dirigeants (CJD) de Nantes qui a proposé, en 2007, de mettre sur pied une commission sur ce thème. Nous avons été acompagné par une société de veille, Covigilance. Pendant six mois, nous avons suivi une formation mensuelle qui expliquait les différentes techniques de veille économique. Nous avons identifié sept enjeux, j’en ai retenu quatre appliqués à l’écoute client, aux tendances et évolutions dans mon métier, à l’innovation et au développement durable, démarche dans laquelle La Pérouse s’est inscrit. Au fur et à mesure que j’ai découvert les techniques et outils, je les ai mis en place dans l’hôtel.

Comment faites-vous votre veille ?

Aujourd’hui, le problème n’est pas d’obtenir de l’information : nous sommes submergés d’informations. La question est de savoir comment l’organiser et en faire quelque chose d’utile. En fait, la veille économique, c’est un état d’esprit qui se travaille. Très vite, si l’entreprise marche bien, on peut s’enfermer dans des certitudes. C’est une nécessité de sortir la tête du guidon, encore faut-il le faire bien…

De quelle manière votre démarche se répercute-t-elle concrètement dans votre activité ?

Les deux tiers de notre clientèle sont issus des affaires. En ce moment, avec la crise financière, cela implique de se renseigner pour savoir si les clients ont eu des consignes pour restreindre leurs frais de déplacement. C’est aussi tirer profit d’informations indirectes comme les difficultés d’une agence de voyage qui travaille avec plusieurs hôtels de Nantes. Enfin, je fais partie de plusieurs réseaux, le CJD, l’office de tourisme, le club hôtelier. Autant de sources qui me permettent d’appréhender le marché et ses tendances.

Combien de temps ce travail de veille prend-il et qui s’en occupe ?

L’organisation de la veille est un problème. Dans l’absolu, je me suis réservé un vendredi après-midi tous les 15 jours pour m’y consacrer. Mais, en réalité, ce rendez-vous revient plutôt tous les mois. De plus, je me suis abonné à des journaux généralistes et professionnels que je lis chez moi.
J’estime que c’est au dirigeant que revient cette tâche : c’est à lui de s’occuper de la stratégie de l’entreprise et de prendre les mesures offensives ou défensives nécessaires à la performance de l’activité. Néanmoins, dans un hôtel, les réceptionnistes ont un rôle important à jouer dans la veille concurrentielle : elles ont ainsi toute liberté pour se renseigner sur les tarifs pratiqués ailleurs. Cela nous permet de réagir très vite, à la hausse comme à la baisse.

Quels sont les coûts liés à cette démarche ?

Outre les coups de fil aux confrères et l’abonnement aux journaux, il y a beaucoup d’outils gratuits : la création d’alertes sur les moteurs de recherche, l’abonnement aux newsletters. Je pourrais acheter des études de marché, mais je n’en ressens pas le besoin.
Quant au coût du consultant, il a été en partie pris en charge par la région, via la Drire (Direction régionale de l’industrie, de la recherche et de l’environnement, NDLR) afin d’encourager les PME à se montrer plus performantes.

Etes-vous satisfait ?

Je ne saurais pas mesurer avec précision l’impact des mesures prises. En revanche, elles nous sécurisent dans nos orientations. Par exemple, sur le parti pris de l’hôtel de s’inscrire dans une démarche de développement durable (NDLR : l’hôtel bénéficie notamment de l’écolabel européen, voir http://perousevip.com/). La veille m’a permis de trouver des confrères qui avaient mené ce type de démarche. Grâce à cela, j’ai pris conscience que certaines de nos actions risquaient d’être mal perçues par nos clients et qu’il fallait prendre le temps de communiquer. Ainsi, lorsque nous avons supprimé les portions individuelles de savon au profit de distributeurs, nous avons pris soin d’expliquer cette initiative : elle permet de supprimer une tonne de déchets par an et d’utiliser des produits respectueux de l’environnement. Ma volonté, c’est de mettre en place une logique gagnant-gagnant entre la planète, les clients et l’entreprise.

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Propos recueillis par Nelly Lambert
Rédaction de NetPME

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