Interview

Nicolas Rohr : « Les entrepreneurs devraient parler de leurs projets lors des soirées entre amis »

Créée en 2009, la startup française Faguo vend ses baskets chez 700 revendeurs en France et à l’international. Nicolas Rhor et Frédéric Mugnier, ses fondateurs, ont lancé leur projet alors qu’ils étaient étudiants et l’ont développé jusqu’à devenir une marque mode de 45 salariés connue pour son engagement écologique (un arbre planté par article acheté). Nicolas Rhor confie leurs secrets pour s’imposer sur un marché très concurrentiel.

Nicolas Rohr : « Les entrepreneurs devraient parler de leurs projets lors des soirées entre amis »

Quelle place a le voyage dans le parcours des entrepreneurs ?

Le voyage est essentiel. Il permet de s’ouvrir, de prendre de la hauteur, et de chercher de la différence chez les autres. En France, nous sommes aveuglés par notre routine, on ne voit pas ce qui se fait ailleurs. Avec Frédéric, mon associé, nous sommes partis en échange scolaire en Chine où l’entrepreneuriat est très concret. Là-bas, les jeunes se lancent tôt dans l’aventure. En comparaison, nous avions l’impression de passer notre temps en soirée en France. Avant de partir, nous avions déjà l’ambition d’entreprendre, mais c’est en Asie que le déclic s’est produit. En revenant, nous nous sommes dit que nous aussi, du haut de nos 21 ans, nous allions créer notre entreprise : Faguo.

N’avez-vous pas eu de craintes à vous lancer dans un marché aussi concurrentiel que celui de la chaussure ?

Il y a une histoire que j’ai retenue d’un cours d’économie : dans les années 1900, un PDG d’une grande entreprise de chaussures envoie deux jeunes en Afrique pour explorer les possibilités de marchés. Six mois après, le  premier revient et affirme qu’aucun business ne peut prospérer car les gens vivent pieds-nus. Le second, lui, déclare que c’est extraordinaire car personne ne porte encore de chaussures et qu’ils pourront donc y développer leurs produits. Comme ce dernier, nous avons décidé avec Frédéric de voir le verre à moitié plein : il y a toujours des opportunités quel que soit le marché. Au début, nous recherchions une idée innovante plutôt immatérielle comme une application. Nous ne l’avons pas trouvée et avons choisi la chaussure, un secteur qui nous plaît. Au final, il y a très peu d’innovations réelles en France. Ce sont plutôt des améliorations de concepts qui existent déjà.

Entreprendre à deux, est-ce ce qui vous a mené au succès ?

Être à deux c’est toujours une richesse. Quand on est seul, on se demande sans cesse si on a fait le bon choix. Moi je bénéficie de l’avis de mon associé qui a autant de poids que le mien. Nous ne sommes pas d’accord sur tout mais nous avons la même vision de ce que nous voulons accomplir donc nous trouvons toujours des compromis. Être deux permet aussi de se répartir les tâches par affinités : par exemple Frédéric s’occupe de la finance et moi de la communication.

Comment conservez-vous l’esprit start-up au quotidien ?

Nous sommes 15 au siège à travailler en open space. Cela nous permet d’entendre ce que chacun fait et crée une plus forte cohésion entre collègues. Nous avons aussi notre routine. Un point d’équipe où chacun présente les projets sur lesquels il travaille est organisé chaque mois. Nous prenons aussi notre petit déjeuner ensemble tous les lundis et nous accueillons des professionnels qui expliquent leur métier : cela nous permet d’enrichir notre curiosité. Nous allons tout faire pour conserver cet esprit startup même si nous sommes amenés à se développer.

Comment faire grandir rapidement sa société ?

Au début, il faut s’y mettre, tout simplement. L’entrepreneur doit commencer par écrire une page qui explique l’histoire de sa société. Ensuite, il doit rédiger son business plan et tout cela ne coûte rien à part du temps et de l’énergie. Aussi, parler de ses projets à ses amis en soirée permet de faire mûrir sa réflexion et de l’enrichir de l’expérience de chacun. La question du financement vient ensuite. Il faut savoir de quelle somme on a besoin, ce qui est parfois dur à déterminer mais essentiel. Enfin, il faut avoir une vision éclairée de ce que l’on deviendra sur le long terme. Savoir où l’on va, en somme. Les levées de fonds sont essentielles pour se développer et l’embauche l’est tout autant. À deux, on est vite limités ! Il faut embaucher pour grossir, c’est inévitable.

 

Propos recueillis par Melissa Carles

 

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