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LF et LFSS 2023 : les mesures sociales intéressant les TPE/PME

Adoptées après le recours à l’article 49-3 de la Constitution, les lois de financement de la sécurité sociale pour 2023 (LFSS 2023) et de finances pour 2023 (LF 2023) ont été publiées respectivement au Journal officiel des 24 et 31 décembre 2022. Tour d’horizon des mesures sociales intéressant les TPE/PME en matière de paie et de RH, de contrôle Urssaf et de lutte contre la fraude sociale.

LF et LFSS 2023 : les mesures sociales intéressant les TPE/PME
Avec ses nouvelles mesures de lutte contre la fraude sociale, la LFSS 2023 a pour objectif d'augmenter de 10 % le nombre de fraudes détectées d'ici 2024. © Getty Images

Limitation de la durée des contrôles Urssaf dans les petites entreprises, renforcement de la lutte contre la fraude sociale, prolongation des règles dérogatoires d’indemnisation des arrêts de travail Covid, revalorisation du plafond d’exonération de la participation patronale aux titres-restaurants, prolongation de l’exonération de forfait social sur certains abondements au PEE sont au nombre des principales mesures sociales des loi de finances pour 2023 et de financement de la Sécurité sociale pour 2023 adoptées fin 2022.

Mesures RH et paie

Arrêts de travail Covid-19 : prolongation en 2023 des règles dérogatoires d’indemnisation

La LFSS pour 2023 prolonge jusqu’au plus tard le 31 décembre 2023 le dispositif d’indemnisation dérogatoire des arrêts de travail liés à la Covid-19 (sans délai de carence ni ancienneté minimale notamment) de l’employeur aux salariés testés positifs à la Covid-19 se trouvant dans l’impossibilité de travailler, y compris à distance (LFSS, art. 27).

Remarque : un décret pourrait, en fonction de la situation sanitaire, mettre fin à ce dispositif dérogatoire de façon anticipée.

Les salariés concernés bénéficient d’un arrêt de travail établi par l’Assurance maladie après une déclaration en ligne sur declare.ameli.fr, et par conséquent des indemnités journalières de la sécurité sociale (IJSS) dans des conditions dérogatoires. Ils peuvent également bénéficier de l’indemnité complémentaire légale prévue à l’article L. 1226‑1 du code du travail.

Remarque : les salariés travaillant à domicile, les salariés saisonniers, les salariés intermittents et les salariés temporaires peuvent également bénéficier de l’indemnité complémentaire aux conditions dérogatoires.

Arrêts de travail Covid-19 : règles dérogatoires en faveur des micro-entrepreneurs et travailleurs indépendants

La LFSS pour 2023 prévoient le maintien en 2023 du mécanisme de neutralisation des revenus instauré en 2021 pour le calcul des indemnités journalières maladie et maternité des travailleurs indépendants, et des modalités dérogatoires de calcul des prestations en espèces versées aux micro-entrepreneurs relevant du régime micro-social (LFSS 2023, art. 27 et 28).

Ainsi, les revenus d’activité 2020 des travailleurs indépendants pourront éventuellement être neutralisés pour le calcul des indemnités journalières maladie-maternité dues pour les arrêts de travail débutant au cours de l’année 2023. Par ailleurs, le calcul des prestations en espèces versées aux auto-entrepreneurs restera déterminé à partir du chiffre d’affaires ou des recettes brutes réalisées et non sur les revenus cotisés.

Activité partielle : le recours en faveur des employeurs publics et étrangers est pérennisé

Dans le cadre de la crise sanitaire du Covid-19, l’ordonnance du 27 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière d’activité partielle avait ouvert la possibilité pour certains employeurs et salariés de bénéficier du régime d’activité partielle alors qu’en principe ils étaient exclus de son champ. Sont notamment visées les entreprises publiques et celles sans établissement en France. Cette mesure avait été prolongée jusqu’au 31 décembre 2022 par la loi de finances pour 2022.

L’article 211 de la LF pour 2023 vient pérenniser cette mesure en l’introduisant dans l’article L. 5122-1 du code du travail (LF 2023, art. 211).

Déduction forfaitaire des cotisations patronales sur les heures supplémentaires pour les entreprises de 20 à 250 salariés

L’article 2 de la loi « pouvoir d’achat » du 16 août 2022 a créé une déduction forfaitaire des cotisations patronales sur les heures supplémentaires réalisées par des salariés des employeurs de 20 à moins de 250 salariés. Cette mesure s’applique aux heures supplémentaires effectuées à partir du 1er octobre 2022

L’article 22 de la LFSS pour 2023 codifie le dispositif à l’article L. 241-18-1 du code de la sécurité sociale et modifie les règles d’imputation de la nouvelle déduction forfaitaire pour les aligner avec celle du dispositif concernant les entreprises de moins de 20 salariés. Ainsi, le montant de la déduction est imputé sur les cotisations dues au titre de l’ensemble de la rémunération versée au salarié et non plus sur les sommes dues au titre des seules majorations salariales liées aux heures supplémentaires réalisées (LFSS 2023, art. 22, I).

Cette modification s’applique rétroactivement aux cotisations dues au titre des périodes courant à compter du 1er octobre 2022.

Remarque : cette mesure avant été anticipée par le BOSS.

Par ailleurs, les rémunérations versées aux salariés à la suite du rachat de jours de RTT (dispositif créé par la loi de finances rectificative pour 2022 du 16 août 2022) ouvrent finalement droit au bénéfice de la déduction forfaitaire de cotisations patronales sur les heures supplémentaires pour les entreprises d’au moins 20 salariés à moins de 250 salariés (LFSS 2023, art. 22, II).

Remarque : la LFSS rend ainsi caduque la doctrine administrative du BOSS, qui avait, au contraire, exclu l’application de cette déduction dans le cadre de la monétisation des JRTT.

Lire aussi Déduction forfaitaire pour heures supplémentaires : le montant est fixé

Revalorisation de la limite d’exonération de la participation patronale aux titres-restaurants

Pour être exonérée de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu, la contribution patronale au financement des titres-restaurant doit être comprise entre 50 et 60 % de la valeur du titre remis au salarié. En outre, cette participation patronale ne doit pas excéder un certain montant.

Déjà relevée de 5,69 à 5,92 € depuis le 1er septembre 2022 par la loi de finances rectificative pour 2022 du 16 août 2022, la limite d’exonération de cotisations et contributions sociales et d’impôt sur le revenu de la part patronale des titres-restaurant est relevée à 6,50 € à compter du 1er janvier 2023, soit une revalorisation de 9,8 % (LF 2023, art. 4).

En pratique, si la participation patronale est de 6,50 €, la valeur du titre-restaurant ouvrant droit à l’exonération maximale est comprise entre 10,83 € (soit une participation correspondant à 60 % de la valeur du titre) et 13 € (soit une participation correspondant à 50 % de la valeur du titre).

Remarque : cette mesure vise à inciter les employeurs qui sont déjà « au plafond » à augmenter leur participation. Il s’agit d’une possibilité, non d’une obligation.

Prolongation en 2023 de l’exonération de forfait social sur les abondements de l’employeur au PEE

La loi de finances pour 2021 a instauré, pour les années 2021 et 2022, une exonération totale de forfait social sur les abondements de l’employeur complétant un versement volontaire du bénéficiaire au plan d’épargne d’entreprise (PEE) pour l’acquisition de titres de l’entreprise ou d’une entreprise du groupe.

En principe, à compter de 2023, ces abondements devaient à nouveau être assujettis au forfait social au taux réduit de 10 %, mais la loi de finances pour 2023 proroge cette exonération d’une année supplémentaire. Ils seront finalement assujettis au forfait social au taux de 10 % seulement à compter de 2024 (LF 2023, art. 107).

Mesures en matière de contrôle Urssaf

La limitation de la durée des contrôles à 3 mois dans les petites entreprises est pérennisée

La loi ESSOC n° 2018-727 du 10 août 2018 a étendu, à titre expérimental, la limitation de la durée des contrôles Urssaf à 3 mois des entreprises de moins de 10 salariés aux entreprises de moins de 20 salariés pour une durée de 3 ans à compter de sa publication, soit jusqu’au 1er août 2021. Depuis cette date, l’Urssaf a poursuivi cette expérimentation par tolérance administrative.

A compter du 1er janvier 2023, les contrôles Urssaf visant les entreprises de moins de 20 salariés et les travailleurs indépendants ne pourront s’étendre sur une période supérieure à 3 mois, comprise entre le début effectif du contrôle et la lettre d’observations. Cette période pourrait être prorogée une fois, soit une durée totale maximale de 6 mois, à la demande expresse de l’employeur contrôlé ou de l’organisme de recouvrement (LFSS 2023, art. 6, I-G et VI ; CSS art. L. 243-13).

Par ailleurs, la loi ajoute deux nouvelles exceptions à la limitation de la durée du contrôle :

  • constat de comptabilité insuffisante ou de documentation soit inexploitable, soit transmise plus de 15 jours après la réception de la demande du contrôleur Urssaf ;
  • report, sollicité par la personne contrôlée, d’une visite de l’agent chargé du contrôle.

Ces deux dérogations s’ajoutent à celles déjà prévues : situation de travail dissimulé ; situation d’obstacle à contrôle ; situation d’abus de droit ; comptabilité insuffisante ou documentation inexploitable. Dans ces différentes situations, la durée du contrôle n’est pas limitée. Ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er janvier 2023.

Lire aussi PLFSS 2023 : vers la pérennisation du contrôle Urssaf limité à 3 mois dans les PME de moins de 20 salariés

Utilisation d’informations et documents obtenus lors du contrôle d’une autre société du groupe

La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2022 permet, dans le cadre d’un contrôle d’une société appartenant à un groupe, aux agents de l’URSSAF d’utiliser les informations obtenues dans le cadre du contrôle d’une autre société du groupe.

Jusqu’à présent, lors d’un contrôle Urssaf, les agents chargés du contrôle ne pouvaient recueillir des informations qu’auprès de la personne contrôlée et des personnes rémunérées par celle-ci (CSS, art. R. 243-59). Pour pouvoir utiliser des informations délivrées par d’autres sociétés du groupe, la jurisprudence (Cass. civ., 2e., 7 janv. 2021, n°19-19.395) exige que l’agent de contrôle recoure à la procédure du droit de communication (CSS, art. L. 114-19) ; une procédure longue et complexe.

A compter du 1er janvier 2023, pour éviter les demandes successives et redondantes des agents de contrôle dans le cadre du contrôle Urssaf d’une entreprise appartenant à un groupe, l’agent de contrôle peut utiliser les documents et informations obtenus lors du contrôle de toute personne appartenant au même groupe que la personne qu’ils contrôlent, à condition d’en informer l’entreprise contrôlée. Le groupe est entendu comme l’ensemble des personnes entre lesquelles existe un lien de détention ou de contrôle au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3 du code de commerce (CSS, art. L. 243-7-4 créé par LFSS 2023, art. 6, I-E et VI).

Ce nouveau droit des agents de contrôle est assorti de garanties pour le cotisant. L’agent chargé du contrôle est tenu d’informer l’entreprise contrôlée de la teneur et de l’origine des documents ou informations obtenus sur lesquels il se fonde. Une copie de ces documents doit être communiquée à l’entreprise contrôlée qui le demande et elle est informée préalablement de cette faculté.

Remarque : un décret en Conseil d’État fixera les conditions et garanties applicables à cette utilisation de documents ou d’informations ainsi que le délai d’information de la personne contrôlée.

Mesures en matière de lutte contre le travail illégal

Modulation de la sanction des donneurs d’ordre défaillants en cas de travail dissimulé

Le donneur d’ordre qui a recours à un sous-traitant est soumis à une obligation de vigilance : il doit s’assurer que son cocontractant est en règle au regard du travail dissimulé et est à jour de ses obligations de déclaration et de paiement auprès des organismes de recouvrement des cotisations et contributions sociales (C. trav., art. L. 8222-1).

Le donneur d’ordre qui méconnaît ses obligations de vigilance, en cas de travail dissimulé de son cocontractant, est tenu à une solidarité financière : il doit payer les impôts, taxes et cotisations obligatoires dus par son sous-traitant, y compris les sommes dues par celui-ci en raison des annulations d’exonérations et de réductions de cotisations et contributions sociales (C. trav., art. L. 8222-2). En outre, il est sanctionné par l’annulation des réductions ou exonérations des cotisations ou contributions dont il a bénéficié au titre des rémunérations versées à ses salariés. Jusqu’à présent, l’annulation des réductions ou exonérations de cotisations dont le donneur avait bénéficié était simplement plafonnée à 15 000 € pour une personne physique ou à 75 000 € pour une personne morale (CSS, art. L. 133-4-5).

L’article 6 de la LFSS pour 2023 prévoit la modulation des sanctions des donneurs d’ordre en fonction de la gravité du manquement. Il établit une sanction différenciée pour les donneurs d’ordre qui manquent à leur devoir de vigilance à l’égard de leur sous-traitant, en cas de travail dissimulé. En outre, la première sanction du donneur d’ordre non vigilant sera différente de celle appliquée en cas de récidive (LFSS 2023, art. 6, I-A et VI).

Ainsi, en cas de premier manquement, l’annulation des réductions ou exonérations de cotisations ou contributions est plafonnée à hauteur de 15 000 € pour une personne physique ou 75 000 € pour une personne morale. Ce plafond ne s’applique toutefois que s’il est plus avantageux que le montant mis à sa charge au titre de la solidarité financière. En cas de récidive dans les 5 ans, ces plafonds ne sont plus applicables. Le montant de la sanction est plafonné à hauteur du montant mis à la charge du donneur d’ordre au titre de la solidarité financière.

Par ailleurs, le donneur d’ordre solidairement responsable de son sous-traitant peut également bénéficier d’une réduction de 10 points du taux des majorations de redressement en cas de règlement dans les 30 jours à compter de la notification de la mise en demeure ou de la présentation d’un plan d’échelonnement des paiements dans ce même délai. Attention ! Cette réduction n’est pas applicable en cas de nouvelle constatation de travail dissimulé dans les 5 ans (CSS, art. L. 243-7-7, II, al. 2 mod. par LFSS 2023, art. 6, I-F).

Remarque : jusqu’à présent, seul le sous-traitant contrôlé pouvait bénéficier d’une modulation à la baisse des redressements majorés pour travail dissimulé.

Ces mesures sont applicables à compter du 1er janvier 2023 (LFSS 2023, art. 6-VI-A).

Élargissement du droit de communication

A compter du 1er janvier 2023, au titre des créances nées après le constat d’une infraction de travail dissimulé, les agents de l’Urssaf et de la MSA peuvent obtenir auprès des établissements bancaires des informations et documents sur les soldes des comptes bancaires détenus par les débiteurs pour connaître leur solvabilité sans qu’il soit opposé le secret professionnel, y compris bancaire (CSS, art. L. 114-19 mod. par LFSS 2023, art. 98, I-7°).

Remarque : les documents et informations demandés devront être communiqués à titre gratuit, par voie dématérialisée sur demande de lUrssaf, dans les 30 jours suivant la réception de la demande.

Communication de renseignements par les tribunaux de commerce

Les greffiers des tribunaux de commerce sont autorisés à transmettre aux agents des organismes de protection sociale et de l’Etat des renseignements et documents recueillis dans l’exercice de leurs missions et faisant présumer des fraudes en matière de cotisations et prestations sociales (CSS, art. L. 114-16 mod. par LFSS 2023, art. 98, I-3°).

Possibilité de mener des cyber-enquêtes

A compter du 1er janvier 2023, certains agents de contrôle de l’Urssaf, de l’inspection du travail et de Pôle emploi se voient attribuer de nouvelles compétences de cyber-enquête pour la recherche du travail illégal sur Internet (CSS, art. L. 8271-6-5 créé par LFSS 2023, art. 98, IV ).

Pour constater ces fraudes et infractions commises par communication électronique, ces agents peuvent notamment procéder sous pseudonyme aux actes suivants, sans être pénalement responsables :

  • participer à des échanges électroniques (y compris avec les personnes susceptibles d’être auteurs du délit de travail illégal)
  • extraire ou conserver par ce moyen les éléments de preuve et les données sur les personnes susceptibles d’être les auteurs des infractions. Ces actes ne pourront constituer une incitation à commettre une infraction, à peine de nullité.

Mesures censurées par les Sages

Rappelons que le Conseil constitutionnel a invalidé les trois mesures sociales suivantes de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023 :

  • la délivrance d’un arrêt de travail par téléconsultation ;
  • la subrogation relative aux indemnités journalières maternité, paternité et d’adoption ;
  • l’assouplissement de la procédure de dérogatoire de renouvellement du congé de présence parentale ;

L’équipe NetPME

 

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