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Contrôle du télétravail à 100 % : le ministère du Travail briefe ses inspecteurs

Le ministère du Travail a détaillé dans une instruction du 3 novembre 2020 les modalités de contrôle de l'inspection du travail en matière de respect du protocole sanitaire et, surtout, du télétravail. Rappelons que les salariés doivent télétravailler à 100 % dès lors que leur poste le justifie.

Contrôle du télétravail à 100 % : le ministère du Travail briefe ses inspecteurs
« Il appartient aux employeurs de déterminer les tâches pouvant être réalisées en télétravail », rappelle la DGT dans une instruction du 3 novembre. © Adobe Stock

Une instruction de la Direction générale du travail (DGT) du 3 novembre 2020 que nous nous sommes procurée précise les orientations et les modalités d’intervention du système d’inspection du travail dans le cadre du confinement entré en vigueur le 30 octobre 2020.

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Règles applicables au télétravail

L’instruction rappelle que le nouveau protocole national sanitaire prévoit que « le temps de travail effectué en télétravail est porté à 100 % pour les salariés qui peuvent réaliser l’ensemble de leurs tâches à distance ». Dans les autres cas, « l’organisation du travail doit permettre de réduire les déplacements domicile-travail et d’aménager le temps de présence en entreprise pour l’exécution des tâches qui ne peuvent être réalisées en télétravail, et réduire ainsi les interactions sociales ».

Activités « non-télétravaillables »

La DGT donne des exemples concrets comme les « fonctions managériales nécessitant une présence minimale sur site pour encadrer des équipes dont les activités ne sont pas réalisables à distance ou d’activités pour lesquelles le salarié a besoin d’accéder à certains outils, notamment informatiques, non accessibles à distance ». Elle vise également le cas de salariés qui rencontrent des difficultés ou des contraintes particulières « dûment justifiées » et mentionne la situation où le manager lui-même perçoit un risque psychosocial particulier.

« Le télétravail n’est en général pas un mode d’organisation applicable pour les activités attachées à des lieux ou des personnes, qui impliquent de se rendre sur des lieux spécifiques par exemple pour inspecter, nettoyer, installer, réparer ou utiliser des outils et machines ou encore s’occuper de personnes ou d’animaux », a également précisé le ministère du Travail dans un nouveau questions/réponses.

« Le seul fait de vouloir organiser des réunions, mêmes managériales, ne saurait justifier de ne pas télétravailler, dès lors que ces réunions peuvent facilement être organisées en audio ou en visioconférence. »

Pour ces activités qui ne peuvent pas être réalisées en télétravail, la DGT précise que « l’employeur organise autant que possible un étalement des horaires de départ et d’arrivée du salarié afin de limiter l’affluence aux heures de pointe dans les transports en commun, à l’entrée et à la sortie des entreprises et dans les locaux sanitaires et sociaux ».

Attention toutefois, « le seul fait de vouloir organiser des réunions, mêmes managériales, ne saurait justifier de ne pas télétravailler, dès lors que ces réunions peuvent facilement être organisées en audio ou en visioconférence », souligne la DGT.

Activités « télétravaillables »

Reste à savoir comment déterminer les postes ou activités « télétravaillables » (cf. encadré). La DGT renvoie cette responsabilité aux entreprises dans le respect du dialogue social. « Il appartient aux employeurs de déterminer les tâches pouvant être réalisées en télétravail et de définir leur organisation du travail intégrant le télétravail dès que c’est possible dans le cadre d’un dialogue social de proximité avec les salariés et leurs représentants, en veillant tout particulièrement au maintien des liens au sein du collectif de travail et à la prévention des risques liés à l’isolement des salariés en télétravail ».

La DGT souligne toutefois que « si l’urgence l’exige, l’employeur peut prendre des mesures conservatoires d’organisation du travail avant d’avoir effectué la consultation du CSE ».

La méthode du ministère

Le ministère du Travail a délivré dans son questions/réponses une méthode aux entreprises pour identifier les postes « télétravaillables ». Il s’agit d’identifier concrètement les activités qui peuvent faire l’objet de télétravail et non de réfléchir à partir des « métiers ». Elle se déroule en trois étapes :

  • lister les principales activités pour chaque fonction ou métier. Ne pas hésiter à identifier des activités qui ne sont pas jugées prioritaires habituellement mais qui pourraient avoir une valeur ajoutée pour préparer la sortie de crise : mise à jour de procédures et de supports de travail, veille, etc ;
  • évaluer les freins ou difficultés éventuelles au télétravail pour chacune de ces activités pour l’entreprise, le client et le télétravailleur (exemples : accès au serveur à distance, qualité du réseau internet, confidentialité des données, relations à préserver avec le client, maîtrise des outils numériques par le salarié concerné, etc.) ;
  • identifier si des moyens et conditions peuvent être réunis pour lever ces difficultés (matériel de travail, installation de connexion sécurisée, ouverture de salles de visioconférence, définition de modalités et de plages de disponibilité pour les clients, les collègues et les managers, formation à distance à l’usage de nouveaux outils numériques, etc.).

Le ministère du Travail recommande d’effectuer ce travail avec les salariés concernés « afin d’identifier au mieux ce qu’il est utile et réaliste de faire en télétravail de manière pertinente » et « ce qui rend possible le télétravail et ce qui l’empêche, ce qui le facilite et ce qui le contraint ».

Lire aussi Télétravail à 100 % et tests en entreprise : ce que prévoit le nouveau protocole sanitaire

Respect du télétravail

Les inspecteurs du travail, pendant cette deuxième période de confinement, doivent s’assurer que le télétravail est bien respecté, « dès lors que cela est possible en fonction des situations réelles de travail et des activités exercées ».

Le salarié qui se heurterait à des réticences de la part de son entreprise doit solliciter en priorité les représentants du personnel et, en cas d’absence de réponse appropriée par le dialogue social, ils peuvent – dans un second temps – demander l’intervention de l’inspection du travail. Les agents de contrôle sont également invités à rechercher des solutions en priorité par la voie du dialogue social.

L’instruction souligne d’ailleurs le rôle essentiel des représentants du personnel dans ce contexte. « Il vous appartient de rappeler aux entreprises, au-delà de l’obligation légale, l’intérêt majeur consistant à consulter et associer, même sous une forme adaptée aux circonstances, le CSE et notamment, lorsqu’elle existe, la CSSCT, afin de renforcer l’efficacité des mesures de prévention mises en place, par l’engagement du corps social dans la mise en oeuvre effective de ces mesures ».

L’instruction précise enfin que la possibilité de recourir à la visioconférence ou à l’audioconférence pour réunir le CSE va être réactivée. Les agents de contrôle devront également veiller à la libre circulation des élus, pendant les heures de travail et en dehors.

Quid du contrôle par l’employeur ?

Le questions/réponses apporte aussi des précisions sur ce que peut faire l’employeur en matière de contrôle à distance de l’activité de ses salariés et des limites qui s’imposent à lui.

Le ministère du Travail rappelle « qu’en matière de surveillance des salariés ne diffèrent pas selon que ceux-ci travaillent sur site ou à distance ». Quelques principes sont donc à respecter lorsque l’employeur entend mettre en place des outils de contrôle :

  • le salarié doit être informé préalablement des méthodes et techniques d’évaluation professionnelle, qui doivent être pertinentes au regard de la finalité poursuivie, ainsi que de toute information le concernant personnellement ;
  • le CSE doit être informé et consulté sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise, notamment sur L’introduction de nouvelles technologies, tout aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (article L.2312-8 du code du travail) ;
  • aucun dispositif ne doit conduire à une surveillance constante et permanente de l’activité du salarié.

Les « keyloggers » qui permettent d’enregistrer à distance toutes les actions accomplies sur un ordinateur sont considérées, sauf circonstance exceptionnelle liée à un fort impératif de sécurité, comme illicite par la CNIL.

De même, le recours à la webcam ou à des appels téléphoniques ne doivent pas conduire à une surveillance excessive. « Seules des circonstances très particulières, dont il appartiendrait à l’employeur de justifier, pourrait rendre nécessaire la tenue de la visioconférence à visage découvert, explique l’autorité sur son site qui estime que dans la plupart des cas, une participation via le micro est suffisante. »

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Florence Mehrez

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