Prud'hommes : le fonctionnement

Le Conseil des prud’hommes a pour mission de juger des litiges opposant un ou plusieurs salariés à son/leur employeur. Dans l’immense majorité des cas, le conseil des prud’hommes est saisi par un salarié, principalement après un licenciement.
Tout employeur est donc susceptible d’être un jour appelé à la barre du Conseil des prud’hommes. La première étape du travail des prud’hommes est la tentative de conciliation, qui n’aboutit que dans 10 % des cas. Vient ensuite le jugement.
Le Conseil des prud’hommes a le pouvoir d’annuler un licenciement ou toute autre sanction appliquée à un salarié, si la procédure montre un vice ou si la sanction semble inadaptée, abusive, ou disproportionnée. Sa particularité est qu’il n’est pas composé de professionnels mais d’un collège employeurs et d’un collège salariés.
Cette rubrique est là pour vous expliquer les rouages du Conseil des prud’hommes, et vous aider à comprendre les enjeux pour vous et votre entreprise.

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Le Conseil de prud'hommes

Dans environ 99 % des litiges prud’homaux, le demandeur est un salarié et dans la très grande majorité des cas, la saisine fait suite à un licenciement. Environ 50 % des dossiers concernent la rupture du contrat de travail et 40 % le non-règlement de salaires ou de primes. On constate par ailleurs une recrudescence des plaintes relatives aux conditions de travail et au quotidien de la vie professionnelle : harcèlement moral, réduction du temps de travail, sécurité et santé au travail (source : Ministère de la Justice – 2015).

Ces quelques chiffres montrent que tout employeur court, un jour, le risque d’être poursuivi par un salarié devant le Conseil de prud’hommes.
Aussi, il est important de connaître les principales règles de fonctionnement de cette juridiction et de respecter quelques conseils pratiques pour mettre tous les atouts de son côté.

Le fonctionnement des Conseils de prud’hommes

Leur organisation

Le Conseil de prud’hommes, présidé alternativement par un conseiller salarié ou un conseiller employeur, est une juridiction paritaire qui a pour mission de concilier et, en cas d’échec de juger, les litiges individuels liés au contrat de travail entre employeurs et salariés. il y a 210 Conseils de prud’hommes en France (en 2016) soit au moins un par département, dans le ressort des tribunaux de grande instance.

Les conseillers sont issus du monde du travail, employeurs, salariés, retraités ou demandeurs d’emploi. A compter du prochain renouvellement des conseils de prud’hommes devant intervenir au plus tard le 31 décembre 2017 (date de fin du mandat des conseillers élus en 2008), les conseillers sont nommés tous les 4 ans par arrêté conjoint des ministres de la justice et du travail, sur proposition des organisations syndicales de salariés et professionnelles d’employeurs.
Chaque Conseil de prud’hommes est composé de 5 sections autonomes : industrie, commerce et services commerciaux, agriculture, encadrement et activités diverses. A compter du 1er janvier 2018, sous réserve des dispositions relatives à la section de l’encadrement, les affaires sont réparties entre les sections en fonction de la convention ou de l’accord collectif de travail dont relève le salarié partie au litige (en l’absence de convention ou d’accord collectif applicable, la section de rattachement est celle des activités diverses).
Une section contient autant de conseillers salariés que de conseillers employeurs car le paritarisme est la grande règle de cette juridiction.

Au sein de chaque section, le bureau de conciliation et d’orientation comprend un conseiller salarié et un conseiller employeur ; le bureau de jugement est composé de deux conseillers salariés et deux conseillers employeurs ; le bureau de jugement en formation restreinte, quant à lui, comporte un conseiller salarié et un conseiller employeur.

Le déroulement du procès

  • La conciliation : La première phase est la tentative de conciliation qui est obligatoire et non publique. Or, pour qu’il puisse y avoir conciliation, il est recommandé que les parties se présentent en personne, éventuellement assistées d’un avocat, d’un salarié ou d’un employeur appartenant à la même branche d’activité, d’un défenseur syndical, de leur conjoint, partenaire lié par un Pacs ou concubin. L’employeur peut également être assisté ou représenté par un membre de l’entreprise ou de l’établissement.
    Si une partie n’est ni présente ni représentée, le bureau de conciliation et d’orientation peut directement juger le litige sur la base des pièces et moyens communiqués par la partie présente ou représentée (sauf si la partie absente se prévaut d’un motif légitime). Si l’employeur et le salarié trouvent un accord, le contentieux prend fin : un procès-verbal de conciliation est rédigé.
    En cas de non-conciliation, soit dans 90% des affaires,la procédure se poursuit devant le bureau de jugement. Pour les litiges portant sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, le bureau de conciliation peut, avec l’accord des parties, renvoyer l’affaire devant le bureau de jugement en formation restreinte.

Remarque : Un décret, devant paraître au plus tard le 1er janvier 2018, doit fixer les conditions à la représentation des parties devant le bureau de conciliation et les modalités de présence obligatoire des parties. L’objectif est d’éviter que l’employeur soit systématiquement absent et représenté par un avocat, afin de favoriser les chances de conciliation.

  • Le jugement : A l’audience de jugement, le débat est public et oral. On peut s’y faire assister ou représenter par un avocat ou toutes autres personnes mentionnées ci-dessus. Hormis l’avocat, les autres personnes doivent présenter au tribunal un mandat de représentation accompagné du k-bis de l’entreprise.
    Le jugement est rendu à la majorité absolue des conseillers prud’homaux et, en cas de partage des voix, l’affaire est renvoyée devant le même bureau présidé par un juge du tribunal de grande instance : cette phase est appelée « le départage ».
    Le Conseil de prud’hommes statue en dernier ressort (c’est-à-dire sans possibilité de faire appel) lorsque la valeur totale des demandes ne dépasse pas 4.000 €.
  • L’appel : Si la demande porte sur une somme dépassant 4.000 euros, on peut faire appel du jugement devant la chambre sociale de la Cour d’appel. L’appel suspend l’exécution du jugement, sauf pour les décisions qui concernent la rémunération, dans la limite de neuf mois de salaires.
    Un pourvoi en cassation est également possible avec la présence obligatoire d’un avocat.
  • Le référé : Il existe aussi une procédure d’urgence, le référé prud’homal, qui permet d’obtenir une décision d’urgence lorsque les circonstances l’exigent. Ainsi, en référé, le tribunal peut ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend. Il peut aussi prescrire des mesures conservatoires ou de remise en état si celles-ci s’imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Ces dernières mesures peuvent être prises même en présence d’une contestation sérieuse.

Quelques conseils pratiques

Se faire assister par un avocat

Le recours à un avocat n’est pas obligatoire devant le Conseil de prud’hommes. Mais, au vu de la complexité croissante des affaires et du foisonnement des textes régissant le droit du travail, il apparaît souvent indispensable pour assurer sérieusement sa défense de se faire assister d’un avocat.

Constituer un dossier argumenté

Pour maximiser ses chances de réussite, il convient, notamment avant de licencier un salarié, de constituer dès le départ un dossier étayé et argumenté. Il est alors possible de prouver le sérieux et la réalité des faits et le comportement fautif de ce salarié. Il faut toujours garder à l’esprit qu’un salarié peut contester le licenciement et saisir les prud’hommes.

Ce dossier doit comporter au minimum les douze dernières fiches de paie du salarié, son contrat de travail et toutes les preuves justifiant le licenciement : attestations de managers ou de collègues, témoignages de clients, courriers d’avertissement et de mise en demeure, mails, rapport d’appréciation du manager, etc.

Se présenter aux audiences

La procédure devant le Conseil des prud’hommes prévoit la comparution facultative de l’employeur facultative et du salarié, chaque partie ayant avec la possibilité de se faire assister ou représenter.
Néanmoins, il est fortement conseillé au dirigeant d’être présent aux audiences. Les conseillers sont, en effet, très sensibles à cette comparution en personne prouvant qu’il prête de l’intérêt à la juridiction et du respect aux conseillers prud’homaux.
Par ailleurs, c’est l’occasion pour l’employeur d’apporter ses explications techniques sur le dossier qui sont ensuite très utiles aux conseillers pour prendre leur décision.

Cette présence est d’autant plus indispensable que certains Conseils de prud’hommes rendent leur décision le jour même. La plaidoirie étayée des arguments de l’employeur est donc très importante.

Réfléchir à tout compromis possible

Rechercher et trouver une solution de conciliation sont les objectifs de la procédure prud’homale. Trouver un compromis est possible à tout moment de la procédure, même après avoir fait appel du jugement.

Or, la recherche d’un accord doit s’étudier avec sérieux en mesurant les risques encourus et l’impact d’un contentieux sur l’image de marque de l’entreprise et sur l’ensemble du personnel. Ainsi, si les arguments développés par le salarié sont pertinents et solides, il peut être judicieux de trouver un compromis pour éviter une procédure longue et coûteuse qui risque de ternir, à terme, l’image de l’entreprise.

A ce sujet, il faut savoir que la durée varie selon l’encombrement du conseil saisi. Par exemple, la durée moyenne en région parisienne est d’environ 10 mois, de la saisine au jugement, et 20 % des dossiers font l’objet d’un départage, ce qui rallonge la procédure de plusieurs mois. Près de 60 % des jugements font l’objet d’un appel et la durée d’un appel oscille entre 1 à 2 ans. Il ne faut donc pas sous-estimer la lourdeur de la procédure, son coût et ses risques. En outre, la loi oblige les entreprises à provisionner un compte en fonction des risques encourus. Ces provisions peuvent, selon les litiges, amputer les résultats d’une entreprise, notamment d’une PME.

Ces délais particulièrement longs rendent la solution du compromis encore plus attractive et doivent inciter les dirigeants d’entreprise à se rapprocher du salarié concerné, de préférence par l’intermédiaire d’un avocat, pour trouver une solution amiable au litige.

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