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TPE/PME : ce que contient le décret « déconfinement »

Attestation « 100 km », mesures barrières impératives, transport de marchandises, livraisons à domicile, taxis, VTC, liste des ERP ouverts et fermés… Lumière sur les dispositions du décret « déconfinement » intéressant les TPE/PME.

TPE/PME : ce que contient le décret « déconfinement »
Les mesures d'hygiène et la distanciation physique doivent « être observées en tout lieu et en toute circonstance ». © Adobe Stock

Grâce à la promulgation ce mardi 12 mai de la loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 juillet – et après la publication d’un premier décret palliatif à la durée de vie très limitée (cf. encadré en fin d’article) -, le gouvernement a finalement pu fixer dans un autre décret publié au JO du 12 mai les règles encadrant le déconfinement. Au programme : l’obligation du port du masque pour les plus de onze ans dans les transports collectifs (privés ou publics), la réouverture de certains commerces (à condition de respecter les gestes barrières et la distanciation) et la limitation à 10 personnes maximum dans l’espace public. Tour d’horizon pour les chefs d’entreprises.

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Des mesures barrières « impératives »

C’est la première fois qu’un décret définit les gestes « barrières » (cf. encadré). Le décret « déconfinement » en fait une règle impérative. Les mesures d’hygiène et la distanciation d‘un mètre « doivent être observées en tout lieu et en toute circonstance ». Cette disposition décrétale pose la question d’un éventuel risque pénal comme l’a souligné sur twitter Nicolas Hervieu, juriste en droit public et droit européen des droits de l’homme.

En tout état de cause, cet élément nouveau pourrait être pris en compte par les juges dans l’appréciation de la loi Fauchon en cas de poursuites pour homicides ou blessures involontaires liées au Covid-19. À noter, après un débat houleux sur la responsabilité pénale du dirigeant en commission paritaire, la loi « déconfinement » a finalement accouché d’une précision mineure incitant le juge à conduire une appréciation in concreto.

Tous les rassemblements, réunions, activités, accueils et déplacement autorisés depuis le 11 mai doivent être « organisés en veillant au strict respect de ces mesures ». Le préfet peut ordonner la fermeture d’un établissement recevant du public (ERP) ouvert depuis le 11 mai qui ne les mettrait pas en œuvre. Les ERP doivent en outre informer les clients ou utilisateurs « par affichage des mesures d’hygiène et de distanciation sociale ».

Enfin, les masques doivent être portés « systématiquement par tous dès lors que les règles de distanciation physique ne peuvent être garanties ». L’exploitant peut limiter l’accès à l’établissement pour permettre le respect de ces règles ou y rendre obligatoire le port du masque.

Liste des mesures barrières

Sont listées par décret les mesures barrières suivantes :

  • « se laver régulièrement les mains à l’eau et au savon (dont l’accès doit être facilité avec mise à disposition de serviettes à usage unique) ou par une friction hydro-alcoolique ;
  • se couvrir systématiquement le nez et la bouche en toussant ou éternuant dans son coude ;
  • se moucher dans un mouchoir à usage unique à éliminer immédiatement dans une poubelle ;
  • éviter de se toucher le visage, en particulier le nez, la bouche et les yeux ».

Outre ces mesures d’hygiène, l’article 1 dispose que « la distanciation physique d’au moins un mètre entre deux personnes » doit être observée « en tout lieu et en toute circonstance ». (article 1 du décret n° 2020-548 du 11 mai 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire)

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La règle des « 100 km » pour les trajets professionnels

Selon l’article 3 du décret, les professionnels doivent se munir d’une attestation (pdf, smartphone) avec le motif « Trajets entre le lieu de résidence et le ou les lieux d’exercice de l’activité professionnelle, et déplacements professionnels qui ne peuvent pas être différés » dès lors qu’ils sortent de leur département et d’un périmètre défini par un cercle d’un rayon de 100 km autour de leur domicile (« à vol d’oiseau »).

En clair, pas besoin d’attestation, ni pour les déplacements de plus de 100 km au sein du département, ni pour ceux hors département de moins de 100 km. La « couleur » des départements (rouge/vert) n’a aucune incidence sur la règle des « 100 km » même si le préfet est habilité « à adopter des conditions de déplacement plus restrictives à l’intérieur d’un département ».

Le professionnel doit, attestation ou non, être capable de fournir aux autorités un justificatif de domicile de moins d’un an (factures, quittances de loyers, avis d’imposition, taxe d’habitation, assurance logement ou du véhicule, carte grise, relevé Caf, etc.). Pour les déplacements nécessitant l’attestation, il doit pouvoir prouver que son déplacement est obligatoire (par tous les moyens).

Enfin, si les déplacements sont récurrents, le professionnel n’est pas obligé de remplir chaque jour une attestation. Et si le déplacement implique plusieurs communes, il convient d’indiquer « déplacement itinérant » à la place du nom de la commune de destination.

Le préfet peut réserver l’accès des transports publics aux professionnels

Le préfet de département ou de la région Île-de-France peut, en cas d’affluence et à certaines heures, réserver l’accès aux transports publics (métros, bus, tramways, etc.) aux professionnels pour les trajets entre leurs lieux de résidence et leurs lieux de travail et les déplacements professionnels insusceptibles d’être différés (motif attestation « 100 km »). Sans justificatif, l’accès peut leur être refusé.

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Transport de marchandises, livraisons à domicile, taxis et VTC

Les véhicules transportant des marchandises doivent être équipés « d’une réserve d’eau et de savon ainsi que de serviettes à usage unique, ou de gel hydro-alcoolique » (article 6). Les conducteurs ne peuvent se voir refuser l’accès à un lieu de chargement ou déchargement pourvu d’un point d’eau ou de gel hydro-alcoolique. Pas de contact autorisé pour la remise et la signature des documents de transport.

Idem pour la livraison à domicile où « le colis devant la porte » devient la norme (sauf déménagements, livraisons particulières ou manutention). « Il ne peut être exigé de signature d’un document sur quelque support que ce soit par le destinataire ou son représentant ». À défaut de stipulation contractuelle, la livraison est réputée conforme au contrat à midi le premier jour ouvrable suivant la remise de la marchandise, si aucune réclamation n’a été « formée » d’ici là.

Enfin, pour les « services privés ou publics de transport collectif réalisés avec des véhicules de moins de neuf places » (taxis, VTC, covoiturage, etc.), il doit être mis en place un affichage « visible pour les passagers » rappelant les mesures d’hygiène et de distanciation physique. Aucun passager n’est autorisé à s’asseoir à côté du conducteur. Un seul passager est admis, sauf si le véhicule est doté d’une paroi de séparation. Dans ce cas, plusieurs personnes d’un même foyer (ou en accompagnement d’une personne en situation de handicap) sont autorisées.

Le port du masque est obligatoire dans les transports à partir de 11 ans

Tout passager de onze ans ou plus doit porter un masque de protection dans les transports (transports en commun, trains, taxis, VTC, véhicules de covoiturage, bateaux et avions). Pour les services privés ou publics avec des véhicules de moins de neuf places, il en va de même pour le conducteur, sauf lorsqu’il est séparé des passagers par une paroi de séparation. Le conducteur peut refuser l’accès du véhicule à une personne ne portant pas de masque.

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Les établissement ouverts et fermés à compter du 11 mai

Un certain nombre de magasins de vente et de centres commerciaux (catégorie M) affichant un « caractère indispensable » étaient autorisés à rester ouverts durant le confinement. Depuis le 11 mai, tous les commerces de la catégorie M (les fleuristes, les magasins de bricolage, les enseignes d’habillement, etc.) peuvent sans exception rouvrir leurs portes. Il en va de même pour les bibliothèques et centres de documentation (catégorie S).

Toutefois, le préfet est « habilité à interdire, à restreindre ou à réglementer, par des mesures réglementaires ou individuelles, les activités qui ne sont pas interdites ». Cela concerne notamment les commerces ou centres commerciaux dont la surface commerciale fait plus de 40 000 m2 : dans ce cas, les commerces « indispensables » resteront ouverts. Il peut aussi « par arrêté pris après mise en demeure restée sans suite, ordonner la fermeture des EPR qui ne mettent pas en oeuvre les obligations qui leur sont applicables » (article 10).

En revanche, les établissement relevant des autres catégories (L, N, P, T, X, Y, CTS, PA et R) ne peuvent toujours pas accueillir du public (cafés, bars, restaurants, cinémas, salles de sports, salles de concerts, salles de spectacles, etc.). Des exceptions existent pour les établissements sportifs couverts, les musées et les établissements d’enseignement.

Un couac au démarrage

Il a fallu s’y prendre à deux fois pour que le décret « déconfinement » fasse son entrée. Les sages de la rue Montpensier ont rendu leur décision sur la loi « déconfinement » dans la soirée du lundi 11 mai. Trop tard pour assurer le même jour sa promulgation. Pour tenir les délais, le gouvernement a donc publié un décret intermédiaire dans la nuit de dimanche à lundi tronqué des dispositions autorisées par la loi non-promulguée. Ce mardi 12 mai, la loi prorogeant l’état d’urgence est entrée en vigueur. Un nouveau décret annulant le premier est alors publié dans la foulée pour encadrer – comme il se devait – le déconfinement.

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Matthieu Barry

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