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Conférence du dialogue social : la prime Macron reprend du service

À l’issue de la conférence du dialogue social, qui s’est déroulée hier, Jean Castex a annoncé la reconduction de la prime Macron de 1 000 € pour tous les salariés. Les aides à l’apprentissage sont prolongées jusqu’à fin 2021. En revanche, la prime à l’embauche des jeunes s’arrête le 31 mai.

Conférence du dialogue social : la prime Macron reprend du service
Les entreprises pourront à nouveau verser en 2021 une prime défiscalisée et exonérée de cotisations sociales de 1 000 € pour « tous les salariés », a annoncé hier Jean Castex. © GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP

C’est dans une cadre très resserré que s’est déroulée la troisième conférence du dialogue social, organisée hier par Jean Castex. Crise sanitaire oblige, les discussions avec les partenaires sociaux se sont déroulées en visioconférence. Seul Bruno Le Maire était présent à Matignon. Elisabeth Borne, s’est, elle aussi, exprimée à distance, ayant été testée positive au virus. Plusieurs mesures de soutien ont été annoncées par le chef du gouvernement à l’issue de ce sommet.

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Le retour de la prime Macron

Primo, la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (Pepa) ou prime Macron reprend du service. Les entreprises pourront à nouveau verser en 2021 une prime défiscalisée et exonérée de cotisations sociales de 1 000 € pour « tous les salariés ».  Il sera possible d’en augmenter le montant jusque 2 000 € pour les entreprises et les branches qui auront soit conclu un accord d’intéressement (vraisemblablement d’ici le 30 juin), soit ouvert une négociation sur la valorisation des métiers » dits de « deuxième ligne », qui devront être les « bénéficiaires privilégiés » de cette prime, a ajouté le Premier ministre. Les conditions d’attribution seront détaillées dans un prochain projet de loi de finances rectificative (PLFR) ou dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2022. En 2019, 4,8 millions de salariés en avaient bénéficié pour un montant moyen de 401 €. En 2020, ce sont 6,2 millions de personnes qui avaient perçu ce coup de pouce (460 € en moyenne).

Le Premier ministre a affirmé sur Twitter que c’était « la juste reconnaissance de leur engagement pour assurer la continuité économique du pays ».

« Je souhaite que le maximum de branches s’engage dans cette démarche, notamment celles qui ne se sont pas emparées de ce sujet l’année dernière. C’est un enjeu d’attractivité de ces métiers », a-t-il complété.

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Les aides à l’apprentissage maintenues

Secundo, les aides à l’apprentissage sont prolongées à l’identique jusqu’à la fin 2021. Cette mesure représente un effort budgétaire de 2,4 Md€, a précisé le ministère du Travail.

Tertio, la prime à l’embauche des jeunes de moins de 26 ans, lancée en août dernier, sera recentrée, à partir du mois d’avril, sur les salaires inférieurs à 1,6 Smic (contre deux Smic actuellement). Et ce, jusqu’à fin mai. Passé ce délai, le dispositif s’arrêtera. Pour la rue de Grenelle, cette différence de traitement n’est pas paradoxale : « On continue un investissement très fort sur l’apprentissage car ce [mode de formation] est en train de changer d’échelle ». En revanche, l’aide temporaire à l’embauche des jeunes n’est plus justifiée, « ce coup de pouce ayant surtout permis d’accélérer les décisions d’embauche ». Au total, 346 000 demandes d’aide ont été formulées.

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Un calendrier de sortie de crise

Au-delà, le gouvernement propose un calendrier de concertations sur la sortie de crise. « Cela peut sembler paradoxal d’engager une réflexion sur la sortie de crise quand la situation sanitaire du moment reste à ce point tendue et incertaine. Mais c’est une nécessité de nous y préparer », a-t-il indiqué. Les travaux se dérouleront en trois étapes.

Tout d’abord, des discussions seront lancées, ce mois-ci, pour établir « les différents scénarios de levée des restrictions sanitaires ». Puis en avril-mai, elles devront porter sur les accompagnements de sortie de crise « au fur et à mesure du retour à la normale et en prenant en compte la situation particulière des différents secteurs économiques ». Selon le gouvernement, il s’agit de « désarmer progressivement » les aides et prévoir, éventuellement de nouvelles mesures d’accompagnement dans le plan de relance. Enfin, il s’agira d’analyser, entre juin et septembre, « les changements durables induits par la crise », pour dégager les « tendances de fond » qui se dessinent, à la fois sur les modes de travail, les conditions de travail, mais aussi les lieux de travail et les compétences.

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Les réactions des partenaires sociaux

« Il n’y a pas eu de grande annonce », ont réagi presque unanimement les syndicats à la sortie de cette troisième conférence de dialogue social. « La nouveauté c’était l’augmentation de 1 000 € de la prime pour les travailleurs de seconde ligne en cas d’accord d’intéressement ou d’accord de méthode sur la revalorisation du métier au niveau de la branche », a cependant noté Michel Beaugas (FO) qui craint que la réticence des entreprises à verser cette prime ne crée des déceptions chez les salariés. Quant au calendrier de sortie de crise, le secrétaire confédéral chargé de l’emploi concède « ne pas avoir de problème pour aller discuter de ces thèmes avec les ministres du Travail et de l’économie : au moins, on pourra donner notre avis ». Michel Beaugas a par ailleurs regretté que le rôle des CSE et leurs élus ne soient pas évoqués par le gouvernement dans la gestion de la crise. Il déplore également que le gouvernement ait continué son projet de réforme de l’assurance chômage. Enfin, FO était d’accord avec les mesures concernant les jeunes, « car c’est en effet à 1,6 Smic que les jeunes peinent à trouver du travail ».

Sur twitter, la CFDT a réagi à l’annonce de la prime à destination des travailleurs de deuxième ligne en indiquant : « La balle est dans le camp du patronat ».

Côté CFE-CGC, François Hommeril a trouvé « pour le moins ambitieux » de la part du gouvernement de fixer pour fin mars des perspectives de sortie de crise. Concernant les négociations, il note que certaines ont bien avancé, comme les transitions collectives tandis que « l’assurance chômage reste le caillou dans la chaussure ». Au sujet des mesures annoncées lors de la conférence du dialogue social, le président du syndicat des cadres regrette que « quand le patron donne une prime, en général c’est parce qu’il ne veut pas donner d’augmentation. La prime crée donc un effet de report négatif sur la rémunération et il est rare de constater un effet positif sur la revalorisation salariale ». François Hommeril s’est dit en revanche « tout à fait favorable aux mesures qui touchent les jeunes, notamment pour les alternants ». Il craint cependant que la prime à l’embauche hors alternance ne crée un effet d’aubaine, « et quand on l’élargit aux CDD de six mois, c’est un emploi qui ne coûte rien à l’employeur ». Il demande également à ce que le gouvernement étudie à compter de 2022 les impacts des mesures l’apprentissage sur le taux d’insertion dans l’emploi des apprentis. Enfin, s’il refuse de commenter les mesures sanitaires, il s’indigne que l’hôpital reste dans une perspective de gestion comme une entreprise privée.

Cyril Chabanier, président de la CFTC, n’a pas trouvé la conférence « concluante » mais a salué les propositions concrètes. Il partage la position du gouvernement sur la prolongation des aides aux jeunes, qu’il qualifie de « bonne décision ». Il est en revanche plus réservé sur les aides à l’embauche « car elles créent des effets d’aubaine. Mais il ne faut pas débrancher ces aides de manière brutale », a-t-il relevé. Quant à la prime promise aux travailleurs de deuxième ligne, les plafonds de rémunération devraient selon lui être précisés prochainement. Il indique cependant ne pas être optimiste, « les employeurs ont dit que les entreprises se trouvaient dans des situations compliquées. C’est un peu fort car celles de deuxième ligne ont pu continuer à fonctionner et donc ne se portent pas si mal ». Cyril Chabanier se montre également favorable au calendrier de sortie de crise : « Il faut envoyer des messages positifs, à condition que l’on parle aussi des aspirations des salariés qui ont profondément changé depuis cette crise ».

La CPME s’est réjouie dans un communiqué « d’avoir été entendue sur le maintien, jusqu’à la fin de l’année 2021, du dispositif de soutien à l’alternance dont l’efficacité en faveur de la jeunesse est avérée. Quant aux aides à l’embauche des jeunes de moins de 26 ans, même plafonnées, leur prolongation jusqu’à mai 2021 reste une bonne nouvelle. La CPME réclamera néanmoins leur maintien jusqu’à la fin de l’année ».

Solidaires, qui n’avait pas été invitée à la conférence du dialogue social, a qualifié cette dernière de « cache misère », renvoyant au « bon vouloir des patrons d’octroyer une nouvelle prime non pérenne ». Pour le syndicat, seules des mesures fortes pourront faire la différence dans la gestion de la crise, comme la hausse des minimas sociaux, la création massive d’emplois dans les services publics, la baisse du temps de travail à 32 heure par semaine ou encore le conditionnement social et écologique des aides publiques aux entreprises.

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Anne Bariet – Marie-Aude Grimont

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