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Quel rôle pour l'entreprise dans la définition des compétences ?

Dans une note publiée la semaine dernière, France Stratégie propose deux pistes pour réorienter la politique des compétences. Dans un système visant à assurer l'insertion professionnelle, l'entreprise doit jouer un rôle renforcé dans la définition des compétences. Si la priorité est plutôt de soutenir la mobilité, elle doit alors être la garante de l'adaptation des compétences.

Quel rôle pour l'entreprise dans la définition des compétences ?

Près de 100 000 jeunes sortis du système de formation initiale en 2016 sans qualification, 10% des 16-29 ans ne maîtrisant pas les compétences de base et des entreprises qui peinent parfois à trouver les compétences nécessaires, autant de faiblesses qui, selon France Stratégie (*), témoignent de l’imperfection de notre système de formation initiale et continue.

Parmi les causes identifiées : une faible professionnalisation des formations, avec un nombre d’apprentis en forte augmentation mais qui plafonne toutefois à 400 000, un trop grand nombre de certificats de qualification professionnelle (CQP) ou de certificats de qualification professionnelle interprofessionnels (CQPI) et une insertion dans l’emploi des jeunes et des demandeurs d’emploi qui reste problématique, surtout pour les moins qualifiés.

Le rôle des entreprises dans la gestion des compétences

En creux, c’est la place de l’entreprise dans la définition de la politique de formation qui est interrogée. En effet, souligne l’étude, « instaurer un modèle de gestion de la main d’œuvre fondé sur la compétence suppose que l’entreprise joue un rôle central dans la définition, l’évaluation et la reconnaissance de ces aptitudes, et qu’elle articule l’évaluation en continu de sa main d’oeuvre avec une politique interne de formation ». Or, constatent les auteurs de l’étude, « seule une petite partie des entreprises parait capable de mettre en œuvre une telle démarche et la gestion des compétences dans les transitions professionnelles est insuffisamment développée ». Une autre question soulevée est celle de la répartition des rôles entre partenaires sociaux, entreprises et pouvoirs publics dans la définition des besoins de formation.

Privilégier l’insertion professionnelle ou la mobilité

Reste à savoir comment réorienter la politique de formation ? France Stratégie propose deux options.

La première se rapproche du modèle allemand et vise avant tout à assurer l’insertion professionnelle dans l’emploi et la continuité professionnelle. Il s’agit alors d’encourager les formations par filière et de mettre l’accent sur l’acquisition et l’entretien des compétences professionnelles nécessaires à l’exercice d’un métier donné.

Dans ce modèle, les entreprises assumeraient un rôle renforcé et une participation plus active auprès de l’Éducation nationale dans la définition des compétences attendues. Leur rôle serait donc essentiellement assuré très en amont. Car dans ce schéma, l’étude écarte les entreprises des réorientations professionnelles et de l’acquisition des compétences de base qui relèverait d’une « éducation permanente à visée émancipatrice ».

La seconde vise à soutenir la capacité de mobilité professionnelle ; elle est plus proche du modèle britannique et privilégie les compétences génériques [celles qui sont mobilisables dans un vaste champ d’activités professionnelles ou sociales et qui comprennent les compétences de base] afin de permettre aux individus de faire face aux évolutions professionnelles. « Dans ce système, les responsabilités entre acteurs publics et entreprises sont réparties en fonction de la nature des compétences en jeu ».

« La professionnalisation passe par la formation continue et relève de la seule responsabilité des entreprises, qui adaptent les individus a priori dotés de compétences génériques à leurs besoins spécifiques », expliquent les auteurs de l’étude. Les formations seraient alors tournées vers les compétences pratiques directement mobilisables par les entreprises. Une partie de l’enseignement professionnel initial est alors transféré vers des acteurs du monde professionnel (chambres consulaires, écoles d’entreprise,…).

L’État aurait un rôle à jouer en soutenant les départs en formation en entreprise via, par exemple, une aide aux remplacements temporaires. Quant aux partenaires sociaux, ils devraient faciliter la reconnaissance entre entreprises de compétences professionnelles transversales et délivrer une information sur les opportunités.

 

(*) « Élaborer une stratégie nationale de compétences », de Morad Ben Mezian, Hélène Garner et Antoine Naboulet.

Florence Mehrez

ActuEL RH

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