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L'autonomie du salarié en forfait-jours ne lui permet pas de réduire unilatéralement son temps de travail

Dans un arrêt du 11 janvier 2023, la cour d'appel de Reims estime justifié le licenciement d'un salarié en forfait-jours qui avait utilisé deux demi-journées de travail pour effectuer des déplacements entre son domicile et son lieu de travail après avoir déménagé à plusieurs centaines de kilomètres. Pour les juges, l'autonomie du salarié en forfait-jours ne permet pas de justifier cette violation de son obligation de loyauté.

L'autonomie du salarié en forfait-jours ne lui permet pas de réduire unilatéralement son temps de travail
Pour effectuer les déplacements nécessaires entre son domicile et son lieu de travail, le salarié utilisait deux demi-journées de travail de la semaine. © Getty Images

L’autonomie inhérente au salarié en forfait-jours ne suppose pas une liberté totale dans son organisation du travail. C’est ce qu’affirme la cour d’appel de Reims dans une affaire en date du 11 janvier 2023.

Dans cette affaire, un responsable des travaux est licencié pour faute grave, huit ans après son embauche pour un ensemble de faits que l’employeur considère comme fautifs. Ce dernier lui reproche un manque de loyauté dans l’organisation de son temps de travail, une utilisation abusive de la carte carburant et du badge télépéage et une utilisation personnelle d’un bungalow de chantier. Si les deux derniers motifs, jugés comme recevables par le conseil de prud’hommes sont retoqués par la cour d’appel, tel n’est pas le cas du premier grief.

De longs déplacements domicile-travail sur son temps de travail

L’employeur reprochait au salarié une « réduction unilatérale significative du volume de travail par une dissimulation de son activité réelle, et ce sans avertir sa hiérarchie ». En effet, le salarié avait déménagé et s’était éloigné de son lieu de travail de quelques centaines de kilomètres. Pour effectuer les déplacements nécessaires entre son domicile et son lieu de travail, le salarié utilisait deux demi-journées de travail de la semaine.

Si le salarié reconnait qu’il s’est éloigné géographiquement de son lieu de travail à la suite de son déménagement, « ce qui est un choix personnel n’ayant pas impacté son activité », il rétorque à l’employeur que, « tenu par une convention annuelle de forfait en jours, cela lui laissait une liberté dans l’organisation de l’exécution de ses missions sans contrainte sur une plage horaire de présence ». Il mettait en avant le fait qu’il respectait bien sa convention de 218 jours quand bien même il aurait réduit son volume de travail de deux demi-journées.

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L’autonomie du salarié en forfait-jours ne justifie pas cette déloyauté

Mais le conseil de prud’hommes, puis la cour d’appel, rejettent l’argumentation du salarié. Les juges estiment justifié ce motif mis en avant par l’employeur. S’ils rappellent que le salarié est en droit d’établir sa résidence familiale « où bon lui semble, dès lors que son contrat de travail ne contient aucune clause spécifique sur la question », cela ne l’exempt pas de faire preuve de loyauté dans l’exécution de son contrat de travail.

Il n’est dès lors pas reproché au salarié de s’être éloigné de son lieu de travail. La cour d’appel relève à cet effet que « de manière pertinente le conseil de prud’hommes a fait remarquer que la lettre de licenciement ne reprochait pas au salarié son déménagement mais ses trajets domicile-travail pendant son temps de travail ».

Ce qui lui est reproché est d’avoir outrepassé ce que l’autonomie dans l’organisation de son temps de travail suppose dans le cadre d’une convention de forfait en jours, et d’avoir ainsi fait preuve de déloyauté. « Cette autonomie ne doit pas méconnaître les amplitudes légales obligatoires que l’employeur est d’ailleurs tenu de contrôler, ni l’obligation contractuelle de réaliser le temps de travail convenu en jours ».

Dès lors, estime la cour d’appel, « en mettant en place une organisation de son temps de travail qui ne permet pas de respecter ses obligations, et fait courir des risques juridiques à l’employeur, sans lui en référer, et en mentant sur sa présence sur un chantier, le salarié a effectivement fait preuve de déloyauté ».

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Florence Mehrez

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