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Le gouvernement déploie son plan d’actions pour recruter des saisonniers

Considéré comme des métiers en tension avec un asséchement du vivier de candidats, les secteurs de l’hôtellerie restauration et du tourisme peinent à trouver des candidats. Olivier Dussopt et son homologue au tourisme, Olivia Grégoire, ont détaillé, mardi 30 mai lors d’un point presse, les premières mesures visant à faciliter le recrutement de saisonniers. Elles seront expérimentées cet été dans une quinzaine de sites touristiques.

Le gouvernement déploie son plan d’actions pour recruter des saisonniers
65 000 postes de saisonniers n’ont pas pu être pourvus faute de candidats sur la saison estivale 2022 et hivernale 2022-2023. © Getty Images

« Tout le monde prend conscience politiquement qu’il faut faire quelque chose », se réjouit Laurent Barthelemy. Le président de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie ou UMIH pour les saisonniers se félicite de cette première feuille de route intitulée « 15 engagements pour améliorer l’emploi des travailleurs saisonniers dans le tourisme ». Le président de l’organisation patronale française du secteur de l’hôtellerie-restauration se félicite notamment de la subvention de 10 M€ supplémentaires par an pour la formation des salariés saisonniers.

« Avoir des fonds dédiés et fléchés est un bon début même si ce n’est pas l’alpha et l’oméga de nos besoins car le vrai sujet est le manque de plus en plus criant de personnel qualifié : ce n’est pas en trois mois que l’on pourra les former pour qu’ils deviennent encadrants et accompagnent ceux qui entrent dans nos métiers » juge-t-il. D’autant que ladite subvention reste « sous réserve des crédits obtenus en loi de finances sur le FNE-formation en 2024 et en 2025 ». En termes de timing, les formations doivent être mises en place dès décembre pour les mois de mars et avril prévient-il.

Contrats « complémentaires »

Le plan saisonniers, qui souhaite notamment les fidéliser d’une saison à l’autre va leur proposer des solutions d’emploi entre deux saisons avec l’aide de Pôle Emploi, notamment via le développement d’opportunités de contrats « complémentaires » avec d’autres secteurs soumis également à de fortes tensions de recrutement comme la restauration collective. Objectif ? Leur assurer une activité tout au long de l’année, notamment pendant la période dite « intersaison » pour qu’il n’y ait « pas de trous dans la raquette ». « C’était une préconisation que nous avions faite sur l’accompagnement des saisonniers pour qu’ils ne repartent pas à Pôle Emploi à la fin de la saison, note Laurent Barthelemy. Nous avons bon espoir qu’elle soit mise en place dès cet été ».

Explications : depuis 2011, les travailleurs saisonniers bénéficient des indemnités de chômage du régime général dans les mêmes conditions que tout demandeur d’emploi inscrit à Pôle Emploi. « On a créé une intermittence de la restauration qui a modifié le secteur d’activité avec des saisonniers qui se sont mis à faire une seule saison et à profiter du chômage ensuite », déplore Laurent Tournier, vice-président de l’UMIH.

Autre axe pour répondre à la problématique essentielle du sourcing des candidats, la création d’une « cvthèque pour la profession par la profession », explique Laurent Tournier, qui accompagne l’organisation patronale sur les sujets du numérique. L’outil gratuit ouvert à tous « monCVnum.fr » a été cocréé par Pôle Emploi, les services de l’Etat et les branches professionnelles. « On voit que la demande est forte puisqu’en une semaine, nous avons déjà enregistré plus de 1 000 dépôts de cv et un millier d’entreprises inscrites » se réjouit-il.

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« Libérer des territoires »

Autre problématique clé, coupler une offre d’emploi et la possibilité de trouver un logement pour les saisonniers. Une difficulté majeure « d’autant plus sur les lieux touristiques compte tenu de la pression foncière », signale Laurent Tournier. Le plan, qui prévoit une demi-douzaine de mesures pour encourager l’offre de logement pour les saisonniers, va « libérer les tensions sur les problèmes d’urbanisme », espère Laurent Barthelemy.

Pêle-mêle, la feuille de route du gouvernement prévoit la création d’une plateforme qui recense les offres de logements pour les saisonniers dans les parcs publics, associatifs ou sociaux ; l’encouragement des agréments de résidences et de logements relevant de l’article 109 loi ELAN pour les jeunes saisonniers dans les zones touristiques ; l’accompagnement des dispositifs existants de mobilisation de logements du parc social ou encore la poursuite d’une logique d’expérimentations et la création de nouvelles solutions sur les zones touristiques comme la mise en place des logements modulaires déplaçables, ou encore l’ouverture de chambres dans les internats scolaires et universitaires à la location pour les saisonniers pendant la période estivale.

Sur cette dernière proposition, Laurent Barthelemy se montre plus sceptique, constatant d’abord qu’il n’y en a pas partout et que suite au courrier d’août 2022 qui encourageait à remplir les internats, « en un an cela n’a pas beaucoup évolué car il y a beaucoup de difficultés à le faire ». Pour Laurent Barthelemy, ce sont essentiellement les problèmes d’urbanisme qui bloquent. Il milite donc pour que l’on fasse en sorte de « libérer des territoires pour faire des constructions, même éphémères ».

Pour y parvenir, il insiste sur la nécessité que les régions, « grandes absentes de ce plan saisonnier » alors qu’elles ont « les compétences économiques, touristiques et de mobilité sur leur territoire », soient également partie prenante. A noter que la feuille de route a vocation à évoluer et à s’enrichir dans les trois prochaines années dans le cadre du Comité de filière du tourisme et des bilans menés périodiquement.

200 000 postes à pourvoir pour l’été

Egalement restaurateur depuis 30 ans dans le Sud-Ouest, Laurent Tournier constate que les difficultés de recrutement « n’ont cessé d’augmenter. Je ne sais pas si nous avons atteint le paroxysme mais cela n’a jamais été aussi complexe » confie-t-il. Si le secteur déplore de ne pas avoir d’observatoire avec des chiffres précis, le gouvernement rappelle que le tourisme emploie environ 300 000 saisonniers chaque année.

« Il connaît de fortes difficultés de recrutement qui se sont accrues sous l’effet de la crise sanitaire puis de la reprise, avec une forte intensité d’embauche ». Prenant l’exemple de l’hôtellerie-restauration, 65 000 postes de saisonniers n’ont pas pu être pourvus faute de candidats sur la saison estivale 2022 et hivernale 2022-2023, indique les services de Bercy dans sa feuille de route. Pour l’été 2023, 200 000 postes de saisonniers sont à pourvoir dans toute la France indique l’Umih.

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Charlotte de Saintignon

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