Actu

Les délais de paiement ne renouent pas encore avec les niveaux d’avant-crise

Les délais de paiement des entreprises françaises s’améliorent progressivement mais de fortes disparités demeurent entre les secteurs et les régions. Parmi les mauvais élèves, les grandes entreprises, le secteur de la restauration et l’Île-de-France.

Les délais de paiement ne renouent pas encore avec les niveaux d’avant-crise
Les plus longs retards s’affichent dans le secteur de la restauration et chez les grandes entreprises. Les bons élèves sont le secteur de la construction et les TPE/PME et ETI. © Getty Images

12,5 jours. C’est le délai moyen de retard des délais de paiement en 2021. S’ils s’améliorent, ils ne renouent pas encore avec les niveaux d’avant-crise. C’est ce que constate l’expert de l’information sur les entreprises Altares qui dresse un état des lieux des délais de paiement en France[*]. Après une flambée des retards de paiement à l’été 2020 (14 jours), la situation s’améliore progressivement. « Si le pic d’activité de l’été 2020 au lendemain du premier confinement a fait flamber les délais de paiement, la solidarité entre les entreprises et le travail du comité de crise – mis en place dès mars 2020 pour dénouer les cas les plus difficiles – ont contribué à un retour rapide à des comportements de paiement plus vertueux », commente Thierry Millon, directeur des études Altares.

Sans toutefois que l’on ait retrouvé des comportements comparables à l’avant crise sanitaire (11,3 jours au premier trimestre 2020). Dans le détail, les plus longs retards s’affichent dans le secteur de la restauration et chez les grandes entreprises. A contrario, les bons élèves sont le secteur de la construction et les TPE/PME et ETI. On observe ainsi un écart de 5 jours de retard en 2021 entre les structures de moins de 50 salariés (12,4 jours de délais de paiement observés en moyenne) et celles de plus de 1 000 salariés (17,4 jours en moyenne). Des retards qui s’expliquent par des process de facturation complexes pour les entreprises de grandes tailles, et par des tensions de trésorerie pour les petites entreprises.

Dans le rang des bons élèves européens

Si la France ne renoue pas encore avec ses niveaux d’avant-crise, elle se détache de nouveau très nettement de la moyenne européenne (13,6 jours). Au pic des difficultés à l’été 2020, les comportements de paiement d’une région à l’autre étaient très hétérogènes avec des retards moyens pouvant varier du simple au double. Ainsi, à l’échelle des territoires, les entreprises de Bretagne, Pays de la Loire et Bourgogne Franche-Comté forment le top 3 des « meilleurs payeurs », avec 11 jours de délais de paiement pour la Bretagne en 2020 et moins de 10 jours en 2021.

Tandis que l’Ile de France fait toujours figure de mauvais élève avec un retard moyen de plus de 20 jours et de 17,3 en 2021. Autres régions qui enregistrent des délais au-dessus de la moyenne nationale, la Corse (16 jours), la région PACA (13 jours) et les Hauts-de-France (12,4 jours).

Dans tous les secteurs, les délais s’améliorent, à l’exception de l’hébergement restauration, durement touché par la crise et les confinements successifs. Alors qu’on y observe traditionnellement des retards supérieurs de 3 à 4 jours à la moyenne de l’ensemble des activités, l’écart s’est encore creusé pendant la crise. À l’été 2020, alors qu’ils dépassaient les 14 jours à l’échelle nationale, ils grimpaient à 21 jours dans l’hébergement restauration. Si la situation s’améliore progressivement, ils dépassent toujours les 20 jours au terme de 2021.

A contrario, les secteurs de l’industrie et de la construction font figure de bons élèves avec des retards moyens qui s’approchent de la barre symbolique des 10 jours, et passent même en deçà pour la construction. Le commerce se distingue aussi en 2021 pour ses délais de paiement (14 jours), le secteur des services aux entreprises (14,6) et la branche information-communication (14,8). Autres secteurs qui s’améliorent en 2021 mais restent au-delà de la barre des 15 jours, le transport et la logistique (16 jours) et les services aux particuliers (15,7 jours).

Lire aussi Délais de paiement : « Le retour à la situation d’avant-crise est trop long » (A. Griset)

Mais la prudence reste de mise

Au regard du contexte de la guerre en Ukraine, Thierry Millon se montre néanmoins très prudent : « L’envolée des prix de l’énergie et des denrées alimentaires, la confiance érodée des consommateurs pourraient fragiliser la reprise des secteurs les plus durement fragilisés par la crise sanitaire comme la restauration et le commerce. Il est donc encore trop tôt pour savoir si dans ce contexte, les factures pourront être réglées à l’échéance des 60 jours de délais maximum ».

L’obligation faite aux entreprises traitant avec le secteur public, quelle que soit leur taille, de transmettre leurs factures sous format électronique, pourrait diminuer ces retards de paiement. Une obligation qui s’imposera à l’ensemble des échanges B2B (y compris ceux du secteur privé) à partir de juillet 2024 et sera étendue aux ETI à partir du 1er janvier 2025 et aux TPE/PME au 1er janvier 2026. Une aubaine selon Thierry Million : « Outre une réduction des coûts, cette mesure devrait aussi permettre de fluidifier les échanges et potentiellement de réduire les retards de paiement. »

[*] Données issues de l’analyse de plus de 35 millions d’expériences commerciales en France.

Lire aussi Délais de paiement : « Chaque jour compte » (P. Pelouzet)

Charlotte de Saintignon

Laisser un commentaire

Suivant