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La loi de finances 2024 en 10 points

Maintien de la CVAE jusqu’en 2027, report de la facturation électronique obligatoire, défiscalisation des primes carburant et transport, harmonisation du régime de franchise en base, création d’un crédit d’impôt en faveur de l’industrie verte, mise en place d'un zonage unique pour les territoires ruraux en difficulté, durcissement de la fiscalité applicable aux véhicules. Tour d’horizon des principales mesures fiscales de la loi de finances 2024 intéressant les PME.

La loi de finances 2024 en 10 points
Dans sa décision du 28 décembre 2023, le Conseil constitutionnel a censuré le régime fiscal des fédérations sportives internationales, pour méconnaissance du principe d'égalité devant les charges publiques, ainsi que 12 autres dispositions considérées comme cavaliers budgétaires. © Getty Images

Définitivement adoptée le 21 décembre 2023, la loi de finances 2024 n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 a été publiée au Journal officiel du 30 décembre 2023, après plusieurs engagements de responsabilité du Gouvernement. Avec près de 120 dispositions fiscales, la loi de finances pour 2024 n’épargne aucun domaine de la vie des entreprises.

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1. Prolongation de la défiscalisation des primes « carburant » et « transport » (art. 7 et 29)

La loi de finances rectificative du 16 août 2022 a assoupli pour les années 2022 et 2023 les régimes fiscal et social de la prime de transport et du forfait « mobilités durables ». Elle a également autorisé le versement d’une prime de transport pour tous les salariés et augmente l’avantage fiscal si l’employeur va au-delà de l’obligation légale pour les frais de transports publics (L. fin. rect. n° 2022-1157, 16 août 2022, art. 2 et 3 : JO, 17 août).

La loi de finances pour 2024 du 29 décembre 2024 prolonge ces mesures pour l’année 2024.

Les mesures dérogatoires qui s’appliquent en 2024, comme en 2022 et 2023, sont les suivantes :

  • l’employeur peut prendre en charge tout ou partie des frais de carburant et des frais d’alimentation de véhicules électriques, hybrides rechargeables ou à hydrogène engagés pour leurs déplacements domicile-lieu de travail (prime transport) par tous ses salariés, et pas seulement à ceux contraints d’utiliser leur véhicule, pour effectuer le trajet domicile-lieu de travail (sous réserve d’un accord collectif ou d’une DUE) ;
  • la prime de transport peut toujours être cumulée avec la prise en charge obligatoire par l’employeur de 50 % des frais de transports publics (titres d’abonnement de transports publics de personnes ou de services publics de location de vélos souscrits par ses salariés pour leurs déplacements domicile-lieu de travail) ;
  • la prise en charge facultative par l’employeur des frais de transports publics au-delà de la prise en charge obligatoire de 50 % est exonérée d’impôt sur le revenu, de cotisations sociales et de CSG-CRDS à hauteur de 25 % ;
  • la prime de transport est exonérée d’impôt sur le revenu, de cotisations sociales et de CSG-CRDS dans la limite de 700 € (900 € en outre-mer) par an et par salarié, dont 400 € (600 € en outre-mer) au maximum pour les frais de carburant ;
  • le forfait mobilités durables (prise en charge facultative et forfaitaire des frais de transport personnels des salariés qui utilisent des moyens de transport alternatifs plus écologiques pour effectuer leurs trajets domicile-lieu de travail : vélo, vélo électrique, covoiturage, service de mobilité partagée, location ou utilisation en libre-service de véhicules électriques, etc.) est exonéré d’impôt sur le revenu et de charges sociales dans la limite 700 euros (900 euros en Guadeloupe, à la Martinique, à la Réunion, en Guyane et à Mayotte) ;
  • en cas de cumul du forfait mobilités durables et de la prime de transport, la limite d’exonération est une limite globale de 700 € (900 € en outre-mer) par an et par salarié, dont 400 € (600 € en outre-mer) au maximum pour les frais de carburant ;
  • en cas de cumul du forfait mobilités durables et de la prise en charge obligatoire des frais de transports publics, l’exonération est limitée au plus élevé de ces deux montants : le montant de la prise en charge obligatoire des frais de transports publics ou 800 euros.

Remarque : la loi de finances fixe, en outre, certaines limites d’exonération applicables à compter de 2025.

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2. Imposition minimale des grands groupes internationaux (Pilier 2) (art. 33)

L’article 33 de la loi de finances pour 2024 transpose en droit interne la directive (UE) 2022/2523 du 14 décembre 2022, dite « directive Pilier 2 », relative à l’imposition minimale de 15 % des groupes multinationaux.

Un impôt national complémentaire, distinct de l’impôt sur les sociétés, est instauré pour les groupes d’entreprises multinationales implantés en France et les groupes nationaux de grande envergure qui développent leurs activités uniquement en France réalisant un chiffre d’affaires annuel consolidé supérieur ou égal à 750 M€ au cours d’au moins deux des quatre exercices précédents. Cet impôt complémentaire est mis à la charge de l’entité mère du groupe lorsque le taux effectif d’imposition du groupe est inférieur au taux d’imposition minimum de 15 % (CGI art. 223 VL nouveau).

Les règles d’imposition minimale s’appliquent aux exercices ouverts à compter du 31 décembre 2023, pour une première collecte de l’impôt complémentaire dès 2026.

3. Création d’un crédit d’impôt en faveur de l’industrie verte (art. 35)

Un crédit d’impôt temporaire, soumis à l’agrément, est créé en faveur des entreprises qui réalisent des dépenses d’investissement dans les secteurs d’activité contribuant à la production de batteries, de panneaux solaires, d’éoliennes ou de pompes à chaleur. Le crédit d’impôt en faveur des investissements dans l’industrie verte (C3IV), dont le taux varie de 20 % à 60 %, est accordé au titre projets d’investissement pour lesquels l’agrément est délivré jusqu’au 31 décembre 2025 (CGI art. 244 quater I nouveau).

Les demandes d’agrément peuvent être déposées par les entreprises depuis le 27 septembre 2023 à l’adresse suivante : c3iv@dgfip.finances.gouv.fr.

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4. Création des JEC et suppression de l’exonération des bénéfices des JEI (art. 44 et 69)

A compter du 1er janvier 2024, le dispositif des jeunes entreprises innovantes (JEI) est complété par une nouvelle catégorie d’entreprise dénommée « jeune entreprise de croissance » (JEC).

Ainsi, sont qualifiées de JEC, les entreprises qui réalisent entre 5 % et 15 % de dépenses de recherche et développement sur leurs charges totales et satisfont à des indicateurs de performances économiques (qui seront précisés par décret). Ces entreprises pourront bénéficier d’exonérations d’impôts locaux (TFPB, CFE et CVAE) et de cotisations sociales et la souscription à leur capital ouvre droit à une réduction d’impôt.

Parallèlement, l’exonération d’impôt sur les bénéfices dont peuvent bénéficier les jeunes entreprises innovantes est supprimée pour les entreprises (dont les JEC) créées à compter du 1er janvier 2024 (au lieu du 1er janvier 2026).

5. Prorogation des dispositifs zonés et création d’un zonage unique pour les territoires ruraux (art. 73)

L’article 73 de la loi de finances pour 2024 reconduit les exonérations fiscales (impôt sur les bénéfices, cotisation foncière des entreprises et taxe sur les propriétés bâties) et sociales, le cas échéant, attachées aux zones géographiques prioritaires arrivant à échéance le 31 décembre 2023. Sont prorogés :

  • jusqu’au 31 décembre 2024, les zonages en faveur de la politique de la ville (zones franches urbaines-territoire entrepreneur (ZFU-TE) et quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPPV)) ;
  • jusqu’au 31 décembre 2026, les zonages de soutien aux territoires en reconversion (bassins urbains à dynamiser (BUD), zones de développement prioritaire (ZDP) et zones de revitalisation des centres‑villes (ZRCV)) ;
  • jusqu’au 31 décembre 2027 les zonages (zones d’aides à finalité régionale (ZAFR) et zones d’aide à l’investissement des petites et moyennes entreprises (ZAIPME)) qui s’inscrivent dans le cadre des lignes directrices européennes relatives aux aides à finalité régionale et aux zones d’aide à l’investissement des PME pour 2022-2027 ;
  • en 2024, les dispositifs zonés ciblant les territoires ruraux (les zones de revitalisation rurales (ZRR), les bassins d’emploi à redynamiser (BER) et les zones de revitalisation des commerces en milieu rural (ZoRCoMiR)), sont avant leur fusion à compter du 1er juillet 2024 dans un nouveau zonage unique dénommé France Ruralités Revitalisation, décliné en deux niveaux, ZFRR et ZFRR +,  en fonction de la vulnérabilité des communes et auxquels sont associés des allègements fiscaux simplifiés et harmonisés.

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6. Aménagement de la suppression de la CVAE (art. 79)

Alors que la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) devait disparaître en 2024, la loi de finances pour 2024 reporte la suppression de la CVAE à 2027 et diminue progressivement le taux de cette cotisation d’un quart par an jusqu’en 2026.

Le taux maximal d’imposition de la CVAE est ainsi abaissé à 0,28 % en 2024, 0,19 % en 2025, 0,09 % en 2026, pour être totalement supprimé à compter du 1er janvier 2027 (CGI art. 1586 quater, I).

7. Réforme du régime de la franchise en base de TVA à compter de 2025 (art. 82)

L’article 82 de la loi de finances pour 2024 transpose la directive UE/2020/285 du 18 février 2020, dont l’objet est d’harmoniser au sein de l’UE les règles applicables aux petites entreprises à compter de 2025. Le régime de la franchise en base est ainsi aménagé pour se conformer aux règles communautaires.

Ainsi, en 2025, les entreprises établies dans un État membre de l’UE pourront bénéficier du régime de la franchise, non seulement dans leur État d’établissement, mais également dans les autres États membres, à condition de ne pas dépasser un plafond de chiffre d’affaires fixé au niveau européen à 100 000 €.

En Franche, le plafond national de chiffre d’affaires permettant de bénéficier de la franchise en base est abaissé à 85 000 € (contre 91 900 € aujourd’hui) pour les activités de vente et porté à 37 500 € (contre 36 800 € actuellement) pour les activités de prestations de services.

Par ailleurs, les modalités de sorties du régime de la franchise en base sont simplifiées et accélérées. Le régime cessera immédiatement de s’appliquer aux assujettis dont le chiffre d’affaires de l’année en cours excède la limite majorée de 93 500 € (au lieu de 101 000 € aujourd’hui) ou 41 250 € (au lieu de 39 100 € aujourd’hui). Et il ne sera plus maintenu l’année suivant le dépassement de la limite ordinaire.

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8. Report de la facturation électronique obligatoire (art. 91)

L’entrée en vigueur de la réforme de la facturation électronique est reportée une nouvelle fois.  Selon le nouvel échéancier de la généralisation de la facturation électronique et de la transmission des données de transaction :

L’obligation d’émission de factures électroniques et l’obligation de transmission des données de transaction et de paiement s’appliqueront :

  • à compter du 1er septembre 2026 (au lieu du 1er juillet 2024) pour les grandes entreprises et les membres d’un groupe TVA (ou assujetti unique) ;
  • à compter du 1er septembre 2026 (au lieu du 1er janvier 2025) pour les entreprises de taille intermédiaire ;
  • à compter du 1er septembre 2027 (au lieu du le 1er janvier 2026) pour les petites et moyennes entreprises et les microentreprises.

L’obligation de réception de factures électroniques s’appliquera à compter du 1er septembre 2026 à tous les assujettis, quelle que soit la taille de leur entreprise.

Attention ! Un décret pourrait venir ajuster ces nouvelles dates d’entrée en vigueur d’un trimestre supplémentaire, soit jusqu’au 1er décembre 2026 ou 1er décembre 2027 maximum selon la taille de l’entreprise.

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9. Durcissement de la fiscalité applicable aux véhicules polluants (art. 97 et 99)

Afin d’accélérer le verdissement du parc automobile français, les articles 97 et 99 de la loi de finances pour 2024 renforcent le caractère incitatif à la transition énergétique des différents malus et taxes applicables aux véhicules de tourisme des particuliers et des entreprises :

  • les tarifs du malus CO2 à l’immatriculation, du malus au poids et de la taxe annuelle sur les émissions de CO2 du parc automobile des entreprises sont augmentés dès 2024 pour les véhicules les plus polluants. Le plafonnement du malus CO2 à 50 % du montant d’acquisition du véhicule est supprimé ;
  • Les exonérations de malus au poids et de taxe annuelle sur les émissions de CO2 dont bénéficient les véhicules hybrides ou assimilés sont supprimées le 31 décembre 2024 et remplacées, à compter du 1er janvier 2025 par des abattements en faveur des véhicules hybrides rechargeables et des véhicules qui utilisent du superéthanol E85.
  • la taxe annuelle sur l’ancienneté des véhicules est remplacée par une taxe sur les émissions de polluants atmosphériques, de 0, 100 ou 500 € selon la catégorie Crit’Air.
  • le champ des véhicules de transport de marchandises assimilés à des voitures particulières au regard de leur usage sera fixé par décret dans l’objectif de l’étendre aux « pick-up » comportant quatre places ou plus et aux « camions hors route » comportant cinq places ou plus.
  • le bénéfice de l’abattement famille nombreuse pour les malus CO2 et au poids est limité à une fois par période de 2 ans.

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10. Renforcement des moyens de lutte contre la fraude fiscale (art. 113 et 116)

La loi de finances pour 2024 prévoit deux nouvelles sanctions en cas de fraude fiscale :

  • une peine complémentaire de privation des droits à réductions et crédits d’impôt est créée (art. 114). Toute personne reconnue coupable d’un délit de fraude fiscale aggravée, du recel de ce délit ou de son blanchiment pourra désormais être privée, à titre de peine complémentaire, du droit à l’octroi de réductions et crédits d’impôt sur le revenu ou d’imposition sur la fortune immobilière, pour une durée ne pouvant excéder 3 ans.
  • un délit autonome de mise à disposition d’instruments de facilitation de la fraude fiscale est créé, visant les personnes physiques ou morales qui mettent à la disposition des contribuables des moyens, services, actes ou instruments leur permettant de se soustraire à leurs obligations fiscales (art. 113).

A défaut de précision dans le texte, ces dispositions s’appliquent aux faits commis à compter du 1er janvier 2024, conformément à l’article 1er de la loi.

Par ailleurs, les moyens de contrôle des prix de transfert sont renforcés : extension du champ de l’obligation de tenir une documentation, augmentation de l’amende, institution d’une présomption de transfert indirect de bénéfices en cas de discordance entre la documentation et les prix effectivement pratiques et enfin, possibilité pour l’administration d’utiliser les résultats postérieurs au transfert d’actifs incorporels difficiles à évaluer pour rectifier, pendant un délai de reprise de 6 ans, l’évaluation retenue par l’entreprise (art. 116).

D’autres mesures fiscales notables pour les entreprises :

  • Pour les transmissions d’entreprises intervenues depuis le 17 octobre 2023, les activités commerciales éligibles au pacte Dutreil sont définies par renvoi aux articles 34 et 35 du CGI. Il s’agit des activités industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale à titre principal, à l’exception des activités de gestion de son propre patrimoine immobilier. Elle exclut ainsi du bénéfice du pacte Dutreil les activités de location de locaux meublés (art. 23).
  • A compter du 1er juin 2024, les entreprises, employant plus de 500 personnes (ou 250 dans les régions et départements d’outre-mer (DROM)), tenues à la publication annuelle d’un BEGES devront respecter cette obligation, pour bénéficier des aides du plan France 2030 au titre de leurs projets soutenant la transition écologique (art. 235).
  • A compter du 1er janvier 2025, deux nouveaux cas de dispense à la condition d’activité exclusive du secteur des services à la personne (SAP) seront applicables en faveur des entrepreneurs individuels soumis aux régimes de la micro-entreprise et micro-social et des TPE de moins de 11 salariés (art. 34).
  • L’actualisation sexennale des valeurs locatives des locaux professionnels est de nouveau reportée, de 2 ans, soit à 2026. En conséquence, les bases d’imposition de 2024 sont revalorisées selon les règles de droit commun de mise à jour annuelle des tarifs (art. 152).
  • Pour les dégrèvements prononcés à compter du 1er janvier 2024, les intérêts moratoires sont étendus au cas où l’administration prononce un dégrèvement pour corriger une erreur qu’elle a elle-même commise, sans qu’une réclamation soit exigée (art. 126).
  • Le plafond de l’abattement fiscal en cas de cession ou de donation de fonds artisanaux, de fonds de commerce, de fonds agricoles ou de clientèles d’une entreprise individuelle ou de parts ou actions d’une société aux salariés est relevé de 300 000 € à 500 000 € à compter du 1er janvier 2024 (art. 22).
  • Le régime fiscal de l’activité de location de meublés de tourisme classés et non classés est réformé : l’abattement de chiffre d’affaires en régime micro-BIC est fixé à 30 % et le seuil de revenus applicable pour bénéficier de ce régime à 15 000 €, sauf lorsque cette activité se situe dans les zones non soumises à une pression importante sur le marché du logement (art. 45).

L’équipe NetPME

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