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NAO 2024 : des packages salariaux pour compenser de moindres augmentations générales ?

Selon les cabinets Sia Partners et Sextant, les négociations salariales ne se focalisent plus uniquement sur la revalorisation du salaire de base : elles englobent désormais les packages salariaux, les mesures sur l'égalité hommes/femmes et la mobilité durable. Des dispositifs complémentaires bienvenus pour anticiper des NAO 2024 qui s’annoncent, une nouvelle fois, « tendues ».

NAO 2024 : des packages salariaux pour compenser de moindres augmentations générales ?
Plusieurs spécialistes annoncent des budgets prévisionnels d’augmentation compris entre 3,5 % et 4 % en médiane en 2024 pour l’ensemble des salariés. © Getty Images

Mauvaise nouvelle : le dialogue social sur les rémunérations est à la peine dans les PME : seuls 8 % d’entre elles ont conclu un accord entre septembre 2021 et août 2023, contre 65 % des ETI.

Les grandes entreprises sont, elles, couvertes en moyenne par 4,1 accords.

Tels sont quelques-uns des résultats de l’enquête présentée le 13 décembre, par les cabinets Sia Partners et Sextant, spécialisés respectivement dans l’accompagnement RH et l’expertise aux CSE. Ses auteurs (1) ont passé à la loupe près de 2000 accords collectifs de NAO, signés en France entre 2021 et 2023, à l’aide d’une solution d’intelligence artificielle générative SiaGPT, pour livrer les grandes tendances des rémunérations en France.

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Le secteur de l’industrie, moteur dans la négociation

Le secteur industriel est ainsi moteur dans la négociation. Alors qu’il représente 7 % des entreprises françaises, il est parvenu à finaliser 29 % des accords conclus de l’échantillon. A contrario, les secteurs comme la construction ou les activités immobilières sont à la traîne au regard de leur poids dans l’économie. Ce sont la CFDT et la CGT qui se mobilisent le plus ; la centrale de Belleville a ainsi ratifié plus de la moitié des accords quand le syndicat de Montreuil en a paraphé 38 %. Par comparaison, Sud solidaires n’a validé que 3 % des compromis.

Si les augmentations générales, qu’elles soient générales (86 % des accords) ou individuelles (50 %), sont des incontournables dans ces négociations, d’autres sujets s’invitent à la table des discussions. C’est le cas par exemple de la prime de partage de la valeur (5 % des accords), des suppléments d’intéressement ou de participation (11 %), des mesures en lien avec l’égalité hommes/femmes (63 %) ou encore relatives à la mobilité durable (13 %).

Les suppléments d’intéressement et de participation davantage plébiscités que la PPV …

Dans le détail, en 2023, les DRH ont privilégié les augmentations générales pour contrer l’accélération de l’inflation : 90 % des accords conclus entre en 2023 y font référence, contre 82 % en 2022. Elles concernent toutes les entreprises et toutes les strates des organigrammes, cols blancs et cols bleus.

Autre tendance : la prime de partage de la valeur ne fait guère recette : un accord sur 20 prévoit un tel bonus dans les accords analysés pour un montant moyen de 738 euros, en hausse sur fin 2022/ début 2023 (819 euros et 1 042 euros).

Les suppléments de participation ou d’intéressement font davantage recette : un accord sur 10 atteste d’un tel versement.

… Mais la mobilité durable fait peu d’adeptes

Les DRH ont également joué sur d’autres leviers, en activant notamment des enveloppes de rattrapage pour réduire les écarts salariaux entre les hommes et les femmes : 63,3 % des accords abordent ce sujet (dont 75 % dans la construction ou 65 % dans la réparation automobile).

Mais, contre toute attente, la mobilité durable qui inclut la forfait mobilité, le covoiturage, l’achat ou l’usage d’un vélo, reste la grande absente de ces négociations, avec 11 % des accords qui abordent ce sujet en 2023 (12 % en 2022). Certes des disparités existent ; ces dispositifs sont davantage activés dans les grandes entreprises et en Ile-de-France, mais les pratiques restent minoritaires.

« Trouver des points d’équilibre »

Dans ce contexte quelles seront les tendances 2024 ? Il est encore prématuré de donner les grandes lignes même si plusieurs spécialistes annoncent des budgets prévisionnels d’augmentation compris entre 3,5 % et 4 % en médiane en 2024 pour l’ensemble des salariés, contre respectivement 4,75 % et 4,95 % en 2023. Avec une part des augmentations individuelles plus importantes si « l’inflation devenait moins forte » dans une logique « de reconnaissance et de performance ».

Mais les auteurs de l’étude prédisent « des négociations difficiles » en raison du ralentissement économique. « Tout l’enjeu sera de trouver des points d’équilibre entre le maintien du pouvoir d’achat et la compétitivité des entreprises », souligne Marie Bouny, Partner stratégie et innovation sociale au sein du cabinet Sia Partners. Rien ne milite donc pour un excès de générosité.

« Il faudra être plus créatif pour parvenir à des accords »

« Il faudra être plus créatif pour parvenir à des accords, abonde Christian Pellet, président de Sextant Expertise. Même s’ils n’aboutissent pas à des résultats mirobolants ils sont importants pour maintenir la motivation des salariés ».

Aussi, en 2024, la piste des packages salariaux est à nouveau recommandée pour « rechercher des mesures complémentaires aux augmentations générales ». Avec parmi les alternatives, des accords incluant des mesures sur les titres-restaurant, le budget ASC, la répartition des cotisations entre part salariale et patronale sur les régimes de prévoyance et de retraite…

D’autant que l’année prochaine la prime de partage de la valeur sera moins attractive. En effet, ces bonus seront soumis à l’impôt sur le revenu et à la CSG/CRDS pour les personnes travaillant dans les entreprises de plus de 50 salariés, en vertu de la loi ad hoc du 29 novembre 2023.

Pas sûr toutefois que les partenaires sociaux apprécient l’idée d’un package salarial, reprenant l’ensemble des composantes de la rétribution. La revalorisation du salaire de base via les augmentations générales et individuelles, restant encore et toujours pour ces derniers « la clef de voûte d’un accord signé ». À suivre…

(1) Marie Bouny, Partner stratégie et innovation sociale et Sébastien Vernède, Partner HR & transformation (Sia Partners), Christian Pellet, président et Olivier Kuhn, responsable de filière pôle social (Sextant Expertise).

Lire aussi NAO 2023 : les entreprises ont lâché du lest sur les salaires

Anne Bariet

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