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Immigration : Olivier Dussopt défend le nouveau titre de séjour "métiers en tension"

Le projet de loi immigration qui sera débattu au Sénat à partir du 6 novembre prévoit la création d’un titre de séjour "métiers en tension" afin de favoriser le recrutement de travailleurs étrangers en situation irrégulière dans les secteurs qui peinent à recruter. Olivier Dussopt récuse l’’idée d'un "appel d’air migratoire" que pourrait constituer cette disposition.

Immigration : Olivier Dussopt défend le nouveau titre de séjour
Le locataire de la rue de Grenelle récuse l’idée d’un "appel d’air migratoire" que pourrait constituer ce nouveau titre de séjour, comme le prétend le groupe LR. © AFP

La date est quasiment fixée mais l’issue des discussions est encore très incertaine : si le projet de loi immigration, adopté par la commission des lois du Sénat, en mars dernier, devrait revenir au centre des débats du Palais du Luxembourg le 6 novembre puis à l’Assemblée nationale début 2024, il peine à convaincre les oppositions, notamment la droite et l’extrême droite. Les discussions s’annoncent à nouveau orageuses.

Au cœur des frictions ? L’article 3 du texte gouvernemental qui prévoit la création d’un titre de séjour « métier en tension » afin de favoriser le recrutement de travailleurs étrangers en situation irrégulière dans les secteurs qui peinent à recruter. Un certain nombre d’amendements visant à supprimer cette disposition ont été déposés.

Olivier Dussopt, le ministre du travail, a défendu le texte, le 26 septembre, devant l’Association des journalistes de l’information sociale (Ajis). « La majorité à l’Assemblée nationale est très attachée à l’équilibre du texte et à la réforme », a-t-il déclaré, regrettant les « crispations politiques ».

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« Double faux procès »

Surtout, le locataire de la rue de Grenelle a dénoncé le « double faux procès » fait à cet article 3. Il récuse l’idée d’un « appel d’air migratoire » que pourrait constituer ce nouveau titre de séjour, comme le prétend le groupe LR.

« Pour qu’il y ait appel d’air, cela signifierait que des personnes résidant en dehors de la communauté européenne (…) viennent en France et fassent le pari de rester trois ans sur le territoire en situation irrégulière puis trouvent un emploi régulier dans les huit ou neuf mois qui précèdent la fin de cette période, que cet emploi soit sur la liste des métiers en tension, qui est révisée tous les deux ans, et qu’ils fassent une demande de régularisation », a énuméré le ministre. « Il faudrait quand même avoir un sacré don de prédiction pour qu’on puisse parler d’appel d’air », a-t-il ironisé.

Par ailleurs, il a indiqué donner sa préférence à l’inscription de cette disposition par la loi et par le vote, s’imposant « à l’ensemble des services de l’Etat » plutôt qu’à un « cadre discrétionnaire », moins sécurisé et susceptible d’être « modifié », en référence à la circulaire Valls (du nom de l’ancien Premier ministre) signée en novembre 2012. Laquelle définit actuellement les modalités de régularisation par le travail.

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Permettre au Parlement de définir les critères d’obtention de ce titre de séjour ?

Pour obtenir une majorité au parlement, Olivier Dussopt a cherché à donner des gages au parti les Républicains (LR) indispensable pour obtenir une majorité. Il propose que le Parlement fixe lui-même les critères d’obtention de ce titre de séjour temporaire, renouvelable d’un an pour donner des « règles uniformes sur tout le territoire ».

« Ce qui autorise le Parlement à faire un contrôle, une évaluation de la mesure ». Avec à la clef, une « clause de revoyure » permettant de rajuster le dispositif.

« Quelques milliers de personnes concernées »

Combien de personnes pourraient être concernées ? Actuellement, la circulaire Valls qui ne restreint pas les régularisations aux métiers « en tension » permet la régularisation d’environ 7 000 à 8 000 personnes par an pour des motifs dits économiques et professionnels, en sus des motifs sociaux et familiaux, avec une pointe à 10 400 en 2022 en raison de la reprise économique, a détaillé le ministre. Le titre de séjour « métier en tension » viserait donc une cible plus limitée, soit « quelques milliers de personnes ».

Le candidat à ce titre doit, en effet, exercer un métier figurant dans la dernière liste des métiers en tension, publiée le 1er avril 2021 au JO et créée en 2008 pour permettre à des chefs d’entreprise qui recrutent une personne extra communautaire d’être dispensés de l’autorisation administrative préalable à la conclusion du contrat.

« Il ne s’agit pas d’une construction arbitraire », a rappelé Olivier Dussopt. Cette liste est établie sur la base d’un « travail statistique » mené par la Dares, avec l’appui du Comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (Crefop). Concrètement, elle recense environ 65 métiers, d’agents d’entretien de locaux à carrossiers automobiles, en passant par chaudronniers, conducteurs routiers, chefs de chantier, régleurs pou encore techniciens des services comptables et financiers. Avec quelques variantes (de l’ordre de 5 % à 10 %) d’une région à l’autre liées à l’activité économique.

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Une régularisation non automatique

Elle devrait aussi être réactualisée. Mais le ministre attend la loi avant de lancer ce travail. Il souhaite également réviser la méthode. Notamment pour prendre en compte « la part des personnes non-communautaires en emploi ». Par exemple, « 25 % des métiers de commis de cuisine et de femme de ménage sont occupés par des étrangers non-communautaires. Quand on sait que ces derniers représentent moins de 3 % de l’emploi total du pays, c’est dire l’importance du maintien dans l’emploi de ces personnes ».

Reste que pour Olivier Dussopt, la régularisation des travailleurs sans papiers occupant des métiers « en tension », ne sera pas automatique. Elle supposera un examen du « comportement » sur le territoire français des étrangers concernés.

Quand bien même un travailleur sans papiers remplirait « les critères d’ancienneté, de métier en tension, d’ancienneté dans l’emploi et d’ancienneté sur le territoire » prévus par le projet, il pourrait « se voir refuser l’accès à un titre de séjour » si, par son « comportement », il s’est rendu « responsable ou coupable de trouble à l’ordre public » ou de « violences », a indiqué Olivier Dussopt.

Quatre thématiques au menu de la Conférence sociale

La Conférence sociale qui devrait se dérouler mi-octobre devrait aborder quatre sujets, selon Olivier Dussopt qui était l’invité de l’Association des journalistes de l’information sociale (Ajis) :

  • Un diagnostic sur l’évolution des salaires et du Smic en France et dans les pays qui nous entourent (prime d’activité, cotisations sociales et patronales, exonérations sociales…) ;
  • La question du temps partiel subi et du sous-emploi ;
  • L’amélioration de la dynamique de négociation de branche sur les salaires mais aussi les classifications ;
  • L’égalité femmes/ hommes.

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Anne Bariet

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