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Les TPE/PME souffrent de la « smicardisation »

Comment les dirigeants des plus petites entreprises font face au « tassement » des salaires ? Une enquête publiée le 27 février par Bpifrance Le Lab et Rexecode dessine un panorama des réactions des employeurs.

Les TPE/PME souffrent de la « smicardisation »
54 % des dirigeants TPE/PME confrontés à des situations de « trappes à bas salaires » déclarent qu’elles représentent un frein à la croissance de leur entreprise. © Getty Images

La « smicardisation » représente un problème pour les salariés, mais également pour les employeurs, montrent les résultats d’une enquête menée auprès de dirigeants de TPE/PME, publiée le 27 février par Bpifrance Le Lab, laboratoire d’idées de la banque publique d’investissement, et par le spécialiste des études économiques Rexecode*.

Le salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic) constitue le seul salaire indexé automatiquement sur la hausse des prix, suivant l’application de la loi. De nombreux travailleurs dont les rémunérations se situent légèrement au-dessus de ce plancher ont perdu en pouvoir d’achat et/ou ont vu leur salaire devenir égal au Smic, un phénomène accentué par l’accélération de l’inflation.

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« Mesures de revalorisation immédiates » décidées par 15 % des dirigeants

Près de la moitié des dirigeants ayant répondu (49 %) à l’enquête « sont concernés par les effets des revalorisations successives du Smic sur les salaires de leurs collaborateurs ». « Dans le détail, 15 % ont entrepris des mesures de revalorisation immédiate pour éviter l’impact sur les échelles de salaires des collaborateurs. Plus du tiers (34 %) ont à l’inverse constaté un tassement des grilles salariales en 2023, c’est-à-dire un rattrapage des salaires par le Smic, dont 15 % pour une majorité de collaborateurs », est-il écrit dans l’étude, repérée par Le Monde.

Les salariés peuvent être défavorables à leur évolution professionnelle. Ainsi, « 18 % des dirigeants de TPE/PME concernés par le tassement des grilles salariales ont déjà été confrontés à un refus de promotion, de formation ou de nouvelles responsabilités par un collaborateur dont le salaire est proche du Smic (soit 8 % de l’échantillon) ».

Chez l’ensemble des dirigeants de TPE/PME ayant répondu aux questions posées, 64 % comptent augmenter les salaires cette année.

La principale raison identifiée par les patrons est la perte d’aides publiques et/ou la hausse d’imposition susceptibles de résulter d’une hausse de salaire. Les personnes dont la rémunération progresse sont susceptibles de voir diminuer le montant de leur prime d’activité et d’augmenter le montant de leur impôt sur le revenu. Les dirigeants ont repéré d’autres motifs de refus de promotion, de formation ou de nouvelles responsabilités, comme l’absence de volonté de monter en grade, une augmentation salariale considérée comme insuffisante par le collaborateur ou la volonté de faire prévaloir sa vie privée sur sa vie professionnelle.

Parmi les chefs des entreprises ayant observé un tassement, 22 % « envisagent des revalorisations salariales dès 2024, permettant un rattrapage total (13 %) ou partiel (9 %) des hausses de Smic ». Par ailleurs, « environ un tiers » prévoient « des augmentations individuelles ».

Chez l’ensemble des dirigeants de TPE/PME ayant répondu aux questions posées, 64 % comptent augmenter les salaires cette année. Qu’ils aient prévu d’accroître ou non les rémunérations, les chefs de ces structures s’attendent à une « croissance moyenne des salaires » en 2024 plus faible que l’année dernière (+ 2,6 %, après 3,4 %), mais toujours supérieure à l’évolution des prix de vente (+ 1,2 %, après 2,5 %).

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« Désmicardiser la France »

Ces données confirment en creux le diagnostic de « la smicardisation » formulé par Gabriel Attal, dans sa déclaration de politique générale, prononcée le 30 janvier devant l’Assemblée nationale. Le Premier ministre avait déploré une « résignation face à la smicardisation, face à des salaires qui n’augmentent plus ou plus assez ».

Pour « désmicardiser la France », le chef du gouvernement souhaite une accélération des « négociations » des grilles salariales au niveau des « branches qui ont des minimums en dessous du Smic ». Ces discussions « doivent aboutir d’ici juin », souhaite Gabriel Attal.

« Et si ce n’est pas le cas, nous sommes prêts à toutes les options, y compris le passage par la loi et les sanctions pour les branches » en question, a précisé le Premier ministre. Le chef de gouvernement souhaite en outre l’inscription « dans le prochain budget » de mesures « pour lever les carcans qui condamnent de trop nombreux salariés à rester durablement » au salaire minimum.

* Les résultats sont issus quelque 1 000 réponses à une enquête menée par voie numérique, du 5 au 14 février, auprès de 3 312 chefs de TPE/PME des secteurs marchands non agricoles, employant 1 à 249 salariés inclus et dégageant un chiffre d’affaires inférieur à 50 millions d’euros).

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Timour Aggiouri

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